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Auteur:  Gaston [ 29 Jan 2007, 17:14 ]
Sujet du message: 

Bonjour Pyne Duythr,

Pyne Duythr a écrit:
le hasard (dans un sens bien precis) est un peu partout en mathematiques.

Qu'est-ce à dire ?

Auteur:  Pyne Duythr [ 30 Jan 2007, 17:41 ]
Sujet du message: 

gaston a écrit:
Pyne Duythr a écrit:
le hasard (dans un sens bien precis) est un peu partout en mathematiques.

Qu'est-ce à dire ?

Tu faiches, gaston. ;-) J'rigole: j'avais qu'a fermer ma gueule.

Un assez bon resume de la situation est propose par Chaitin (un chic type qui a, d'une certaine facon, etendu les theoremes d'incompletude de Goedel): "Le hasard des nombres".

Juste un exemple, histoire d'avoir quelque chose a bouffer: l'ensemble (ou la "droite") des nombres reels. Bref, les nombres reels. Y'a plusieurs classifications possibles des nombres reels. La version classique est:
  • ensemble des nombres naturels N: 1, 2, 3, ...,
  • ensemble des nombres entiers (relatifs) Z: ..., -2, -1, 0, 1, 2, ...,
  • ensemble des nombres rationnels Q: nombre qui est un quotient d'entiers relatifs x et y, avec y ≠ 0,
  • ensemble des nombres irrationnels R\Q (cad tous les nombres qui ne sont pas dans Q (Z, ce sont les rationnels avec y = 1: y'a identification entre x/1 et x)): nombre qui n'est pas un quotient d'entiers relatifs, ie qui n'est pas rationnel; y'a deux sous-ensembles particuliers (dont l'union est R\Q):
    • ensemble des irrationnels algebriques: irrationnel qui est la racine d'une equation polynomiale a coefficients rationnels (exemple: √2),
    • ensemble des irrationnels transcendants: irrationnel qui n'est racine d'aucune equation polynomiale a coefficients rationnels, bref, irrationnel qui n'est pas algebrique (exemples: π, sin(1), e et 2^(√2); on ignore par contre si π + e est transcendant (la liste des commissions de l'ignorance est longue, tres longue... )).
Tout nombre reel fait partie d'au moins un de ces ensembles. En fait, l'ensemble des nombres reels R est l'union de tous ces ensembles. Jusque-la, tout va bien, meme s'il peut y avoir quelques surprises. Juste une petite: l'ensemble des irrationnels algebriques est (infini) denombrable (= y'a autant d'irrationnels algebriques que d'entiers), alors que l'ensemble des irrationnels transcendants est infini non-denombrable (= y'a plus d'irrationnels transcendants que d'irrationnels algebriques, donc que d'entiers). Y'a d'autres classifications, certaines d'entre elles ont une intersection non-nulle avec celle brievement decrite ci-dessus, voire sont carrement transverses. Par exemple: un nombre algebrique est la racine d'une equation polynomiale a coefficients rationnels. Ainsi, tout nombre rationnel est algebrique (mais tout algebrique n'est pas rationnel (voir irrationnels algebriques)). Autre exemple: un nombre calculable (ou recursif) est un nombre dont les digits peuvent etre craches par une machine de Turing MT. Une MT est en gros l'abstraction de l'idee de calcul. Bref, c'est un bidule, un "calculateur universel", dont le comportement est dicte par un algorithme (ou un programme). Ainsi, tout nombre algebrique est calculable. Etc., etc.. Y'a une tonne d'autres proprietes, donc de definitions, permettant de classer les nombres reels et d'y voir un peu clair. Dernier exemple (le plus important par rapport au sujet de ce post): un nombre aleatoire (ou non-compressible, ou encore incompressible) est un nombre dont la suite des digits est incompressible. Que signifie "incompressible" dans cette definition? Faut d'abord definir ce qu'on appelle la complexite K de Chaitin-Kolmogorov. Si s une suite, la K de s est le nombre minimal d'instructions necessaires pour ecrire le programme capable de generer s (ce programme tourne sur une MT). s "incompressible" signifie alors que le programme le plus court capable de generer s a une longueur qui n'est pas significativement plus petite que s elle-meme. En se basant sur cette definition, π n'est pas aleatoire: on peut generer un nombre arbitraire de ses digits a l'aide de programmes courts (voire tres tres courts) de longueur fixe. Bref, le truc marrant est le suivant: l'ensemble des nombres non-aleatoires est de mesure nulle dans R. Ca veut dire quoi? Ca veut dire que que les nombres aleatoires sont tellement majoritaires (doux euphemisme!) dans R qu'on peut dire sans le moindre etat d'ame que le nombre de nombres non-aleatoires est (plus que) negligeable. Bref, presque tous les nombres reels sont aleatoires (donc, entre autres, non-calculables). Impressionnant (enfin, ca impressionne bibi), surtout si l'on tient compte d'un detail qui n'en est pas un: aleatoirite ↔ (plus ou moins a une certaine forme d')inconnaissabilite. En gros. Tres gros. En resume: le hasard (dans un sens bien precis) est partout en mathematiques. En quoi cette constatation (c'est en fait un theoreme) est-elle importante? Principalement pour une raison: y'a un lien tres tres etroit - y'a en fait equivalence (ici faudrait etre un chouilla plus precis) - entre "indecidabilite" et "incompressibilite" (voir le petit texte de Chaitin, ainsi que les 1°, 2°, 6° et 10° des 23 problemes de Hilbert et ce qu'on en a fait). Y'a egalement d'autres raisons non strictement mathematiques, mais pas des moindres!, que recouvre en general le vocable aussi vague que visqueux "physique de l'information". Bref, la nature est-elle recursive? Existe-t-il de l'incompressible dans la nature? Les oeufs durs sont-ils une punition divine? No se. Meme si j'aurais plutot tendance a repondre 'oui' a la premiere question, 'non' a la deuxieme (si et seulement si "recursif" et "incompressible" sont pris au sens le plus fort) et 'oui' a la troisieme (avec ou sans l'odeur).

Mais le plus important, c'est l'amour. Arf!

Auteur:  Gaston [ 31 Jan 2007, 10:03 ]
Sujet du message: 

Bonjour Pyne Duythr,

Tout ceci n'est pas banal. C'est vraiment très intéressant. Et surprenant. Je pensais mieux connaître les nombres réels : je n'imaginais pas qu'ils puissent cacher un monde aussi bizarre. Encore plus surprenantes les implications que cette approche peut ou pourrait avoir en mathématiques, en physique et en philosophie des sciences. Merci.

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