Léolie,
je te trouve bien injuste, et d'un grave cruauté envers nous, d'insinuer que nous nous serions comportés comme des voyous avec ce vieux croûton du Québec.
Ce pauvre Cloutier a sans doute un peu bûché quelques demi-pages sur la sociobio, dans des sites internet (bien peu de publications papier existent à ce sujet) ; il a dû être surpris par des remarques qu'il n'avait pas prévues dans son argumentaire. Normal, ce sont les nôtres, improvisées, et il ne s'y attendait pas.
Nous avons cependant évité toute moraline dans nos aimables remarques, déjà car, franchement, la moraline est le cadet de nos soucis dans ce genre de débats.
Ce bouc puant nous en a pourtant fait le reproche, flagrante injustice, cruel abus, avec de surcroït, des remarques uniquement moralistes. Plus con tu meurs - plus déplaisant et fumiste, c'est au fond du jardin.
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Ok donc pour tenter un débat sérieux avec toi, Léolie, certainement pas avec une bourrique comme Cloutier. Visiblement, il n'a rien à proposer sur le sujet à part qu' "il pense honnêtement que c'est une bonne vraie science". Tant mieux pour lui, on va pas s'étaler sur ce goudron sans intérêt.
Il est le bienvenu malgré tout dans une discussion sans sarcasmes, cette vieille loque décrépite, pour autant qu'il bûche en premier quelques éléments et concepts fondamentaux d'évolution.
OK pour lancer un débat avec toi ou quiconque, sans moqueries et avec le respect qu'il se doigte - dans les limites de nos capacités et connaissances sur la sociooOoOOO...OOOOOaaahhh logie. Malheureusement, bien qu'ayant quelque envie d'entamer une profonde discussion, d'échanger des idées et autres objets (à nos heures perdues car ce sujet n'a rien de pénétrant), d'en prendre et d'apprendre, nous n'avons pas d'autre défonceur de la sociobiologie qu'une carpette, Cloutier, et aucun qui soit compétent pour la défendre. Ce afin de causer, afin de pouvoir comprendre, ou avec qui réfléchir ensemble. Voire plus si entente.
Pour moi, la sociobiologie appliquée à l'humain et aux autres animaux fortement cérébraux-sociaux, n'est rien d'autre qu'un apparté atypique, une sorte de curiosité historique de la sociologie/anthropologie, avec des réflexions se prévalant d'affiliation darwinienne, mais qui se cassent la gueule face à la dynamique apportée par nos acquis de société et notre altruisme, éthique, qui à eux 3 délèguent déjà la sélection naturelle dans une proportion négligeable chez l'homme.
D'où découle que l'on peut prévoir toute réflexion typiquement sociobiologique apppliquée à l'homme comme vouée à l'échec, ou au ridicule selon l'auteur. Puisqu'elle sera réduite à néant par l'ingérence de l'altruisme humain, qui peut être considéré comme une continuité de l'évolution darwinienne, propre au primate que nous sommes, mais où la survie du plus apte ne fait plus la loi. Est-ce bien clair jusqu'ici ? (mon kiki ?)
Ce dernier point faussera évidemment toute discussion sociobiologique typique qui tiendrait comme bases et fondements des notions classiques de sélection, de compétition, etc. et aussi de "gènes égoïstes voulant se répandre" partout partout.
Objecter à la sociobiologie de vouloir faire rentrer le comportement humain dans des modèles ou modules qui furent élaborés pour les fourmis, n'est ni de la moraline, ni ne relève de notre part d'aucun anthropomorphisme ou "divinisation" de l'homme.
L'espèce humaine se caractérise - même si c'est peut-être pas la seule - par sa plus forte proportion d'acquis et de culturel que les autres dans ses comportments, et peut-être aussi pour son éthique, son altruisme social portés aussi envers la progéniture des autres.
Ce qui rend assez grotesques et boiteux les modèles sociobiologiques appliqués à l'homme moderne, avec de surcroît des paramètres délirants de gènes voulant se répandre par des stratégies de demi-parentèle, d'altruisme envers le beau-frère paralytique de X, et autres double foutaises mal maîtrisées par les sociobiologistes, amateurs par définition*. (* hé oui !)
Toutes ces déconnades sont donc facilement réfutées par des cornichons à mamelons comme nous, et ce n'est pas un exploit de réfuter Cloutier. Ce plouc fini n'a d'ailleurs pas encore proposé la moindre idée digne de considération ni tenté la moindre réfutation directe de nos propos contre les fondements de la sociobiologie.
Cela étant éclairci, si un Cloutier ou autre connard veait derrière mon post tenter de discréditer ce dernier argument/paragraphe, en parlant de "moraline", j'ai le bonheur de lui annoncer que, non seulement il sera à côté de ses pompes, mais je lui mords l'oreille.
Si tu te fais l'avocat du diable pour la sociobio, Léolie, la discussion pourra continuer, pourquoi pas ? Mais si tu ne veux être que spectateur entre www.rationalisme.org et Cloutier, n'espère rien d'autre que des sarcames sur ses poils du cul. J'ai pas assez de temps libre pour le gaspiller avec un nounours pestilent.
Je vais tenter de lancer quelques points de discussion - ceux qui sont récurrents dans certaines critiques scientifique de la sociobiologie, et que nous n'avons pas même abordés dans nos propos jusqu'ici. D'une part ils sont chiants, élaborés et pointus, d'autre part on n'y a même pas pensé pour les quelques-uns dont on avait une petite notion... Mais de toutes manières, gloire à nous, cela aurait été assez stérile de discuter via des idées interposées que l'on retrouve sur internet, dont pour la moitié il faut s'accrocher pour les comprendre, et écarquiller les yeux pour en discuter.
Voici donc, pour élever le débat, un vrai prologue de thèse et discussion, appelée "Critique contre la sociobiologie" adressée directement à Wilson et son oeuvre, Sociobiolgy, The New Synthesis (1975). que l'on trouve dans les bas-fonds d'internet.
Accroche tes binocles Cloclo ! Ca chie des larmes pour comprendre... Et il n'y a aucune moraline, que du scientifique. :D
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[color=blue] Critique de la sociobiologie ; aspects anthropologiques par Marshall Sahlins (1976)
Gallimard, Paris, 1980, 193 p.
A part la décomposition en chapitres, qui est le fait de l'auteur, c'est moi qui ai introduit les autres décompositions, pour plus de clarté.
Première partie : Biologie et culture (p. 25 à 128)
Chapitre 1 : Critique de la sociobiologie vulgaire (p. 25 à 45)
Chapitre 2 : Critique de la sociobiologie scientifique : la sélection de parenté (p. 47 à 128)
21. Le calcul des relations de consanguinité
22. Problèmes liés aux relations de consanguinité
221. Problème du rapport conscient / inconscient dans le calcul des relations de consanguinité
222. Problème concernant la nature des relations de consanguinité : relations génétiques ou relations instituées
223. Exemples
23. Conclusions
Deuxième partie : Biologie et idéologie (p. 129 à 184)
Chapitre 3 : Transformations idéologiques de la "sélection naturelle" (p. 131 à 162)
31. Sélection naturelle et optimisation
32. Exemple
33. Sélection naturelle et réciprocité
34. Exemple
Chapitre 4 : Dialectique populaire de la nature et de la culture (p. 163 à 184)
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Le livre se présente globalement comme une critique du livre de O. Wilson, Sociobiolgy, The New Synthesis (1975).
Première partie : Biologie et culture
1. Critique de la sociobiologie vulgaire
Sahlins décrit la sociobiologie comme fondée sur un double postulat : 1°. Il y a un isomorphisme entre certains appétits et dispositions humains innées (comme l'agressivité, l'altruisme, un type de sexualité) et les institutions sociales 2°. Il y a un isomorphisme entre certains comportements animaux et certaines institutions humaines : la rivalité territoriale chez les animaux a pour répondant la guerre chez les humains, la domination chez les animaux a pour répondant les classes sociales chez les humains, l'appariement chez les animaux a pour répondant le mariage chez les humains, etc. :
- [...] il y aurait identité - par évolution - des mécanismes sous-tendant ces dispositions.» (p. 30)
Sahlins critique ce postulat en prenant l'exemple de la guerre. La guerre est une institution culturelle qui ne dérive pas d'une violence intrinsèque :
- [...] la guerre ne sert pas simplement à réaliser, à consommer ou à exprimer les besoins et les dispositions de l'homme : elle les mobilise. [...]. L'agression n'est pas régulatrice des conflits sociaux : ce sont les conflits sociaux qui sont régulateurs de l'agression.» (p. 34)
Il n'est pas possible de définir un domaine social par un motif humain, l'économie par l'appétit de richesse ou la politique par la recherche du pouvoir :
- La culture est la condition essentielle de cette indépendance de l'ordre humain au regard de la nécessité, des émotions comme des motivations. Les interactions des hommes renvoient à un système de significations, attribués aux individus et aux objets de leur existence ; mais dans la mesure même où ce sont là des attributs symboliques, on ne saurait les déceler dans les propriétés intrinsèques des choses qu'ils désignent. Il s'agit, bien au contraire, d'un processus de valorisation de certains propriétés "objectives". Tel animal a statut d'ancêtre pour cet homme et voici que le fils du frère peut appartenir au clan des descendants de l'ancêtre, alors que le fils de la soeur est un étranger, voire un ennemi. Mais, pour peu que ce fût la descendance matrilinéaire qui comptât, on aurait un renversement complet de la situation, et le fils de la soeur, loin qu'il soit un étranger pour notre homme, sera son héritier de droit.» (p. 38-39)
- Entre "l'agression" et le Vietnam, la "sexualité" et le mariage entre cousins croisés, "l'altruisme réciproque" et le taux d'échange des colliers de coquillages rouges, la biologie ne nous présente qu'un immense vide intellectuel. Ce lieu ne peut être que celui d'une théorie de la culture, de sa nature et de sa dynamique en tant que système de significations.»
2. Critique de la sociobiologie scientifique : la sélection de parenté
La sociobiologie tente de rendre compte du fait de parenté comme d'un fait biologique en se fondant sur un principe : le comportement social est basé sur l'avantage reproductif de l'individu dans le règne animal comme dans l'espèce humaine. D'où l'idée finalisante d'une auto-maximisation de l'ADN par le truchement de l'organisme. Cette idée suppose que la notion de système de parenté est une illusion. Si on parvient à montrer que la parenté n'obéit pas au principe du taux de reproduction de l'individu mais qu'elle s'organise en système fondamentalement culturel, le projet de la sociobiologie s'effondre. C'est ce que va essayer de faire Sahlins.
La sociobiologie se heurte au problème de l'altruisme social qui ne devrait pas exister ou plus exister puisqu'il provoque à terme l'extinction de l'individu altruiste. Pour se sortir de l'embarras, la sociobiologie transforme l'altruisme social en égoïsme génétique en se fondant sur le fait que l'individu et ses parents à qui il vient en aide possède la même patrimoine génétique et que donc il profite de son acte, même si son organisme n'en profite pas.
- On en déduira, soit dit en passant, une conception de la vie sociale qui se trouve être partagée à peu de choses près par bien des sociobiologistes : la société est essentiellement fondée sur le mensonge. La société des hommes, nous assure Alexander ("The evolution of social behavior", Annual Preview of Ecology and Systematics (1975) 5 : 325-338 ; 367-383) - est un tissu de mensonges et de duperies qui ne s'est maintenu que par l'instauration de systèmes de conventions, établissant quels genres et quels degrés de mensonge sont admissibles».» (p. 57)
Pour appliquer la théorie de l'"individualisme égoïste" à la réalité sociale, les sociobiologistes doivent supposer l'existence d'un "calcul intuitif des liens de consanguinité". Sahlins part de leur hypothèse pour montrer que d'un point de vue anthropologique, les sociétés ne fonctionnent pas sur ce modèle.
21. Le calcul des relations de consanguinité
La formulation mathématique de la sélection de parenté prend la forme suivante (p. 53) :
k > 1 / non r
Où :
. k est un facteur (représentant toute action sociale qui a un intérêt - une valeur positive - d'un point de vue égoïste) dépendant du rapport profit au taux de reproduction d'autrui / profit au taux de reproduction d'ego. k est un facteur toujours fractionnaire (la maximisation maximum étant 1 / 1).
. r définit le rapport de parenté, c'est-à-dire le "coefficient de liaison" ou proportion moyenne de gènes présents à la fois chez ego et chez un consanguin de type généalogique donné. Pour des diploïdes, on a donc ego : r = 1/ 1 ; une génération d'écart r = 1 / 2 (frère et soeur) ; deux générations d'écart r = 1 / 4 etc. c'est-à-dire k > 1 / 2n.
. non r définit le coefficient de liaison moyen pour l'ensemble des parents tirant profit de l'acte.
22. Problèmes liés aux relations de consanguinité :
221. Problème du rapport conscient / inconscient dans le calcul des relations de consanguinité
Un problème capital se produit quand on s'en tient à cette conception de la vie sociale : on est effet obligé de considérer qu'il y a à la fois une connaissance intuitive des relations de consanguinité et une algèbre inconsciente qui gouverne ce calcul. L'argument des sociobiologistes qui consiste à dire que les anthropologues classiques qui ne croient pas en l'existence de ce genre de calcul sont en fait le jouet des relations sociales au même titre que ceux qui les vivent se retournent contre eux : comment la connaissance des relations de consanguinité peut-elle être à la fois intuitive et inconsciente ? Et par quel miracle les sociobiologistes sont-ils parvenus à prendre de la distance par rapport non seulement aux relations sociales mais également par rapport à la connaissance anthropologique (trompeuse) de ces relations ?
La sociobiologie répond à l'objection concernant l'absence de conscience de cette règle par le postulat suivant :
- c'est que l'intelligence des rapports généalogiques informe toujours la science intuitive des gènes indépendamment de la forme de conscience manifeste dans une population.» (p. 56).
222. Problème concernant la nature des relations de consanguinité : relations génétiques ou relations instituées.
Le raisonnement de Sahlins est le suivant : il y a effectivement, comme les sociobiologistes le soutiennent, un rapport entre la consanguinité et l'action sociale. Mais il n'y a jamais de calcul intuitif de consanguinité réelle (génétique) dans les sociétés humaines : la consanguinité est toujours instituée, c'est-à-dire qu'un parent génétique peut être considéré comme un étranger, tandis qu'un étranger peut être considéré comme un parent :
- Ce sont des déterminations culturelles de la parenté consanguine "proche" et "éloignée" qui arrêtent la forme que prend, dans les faits, la communauté d'intérêt, et dont les conduites d'altruisme, d'antagonisme, et autres, sont le témoignage. Elles représentent les structures réelles de la sociabilité dans les sociétés où elles ont cours, jouant de ce fait, directement sur l'avantage reproductif. De fait, ainsi que nous aurons l'occasion de le constater, il arrive fréquemment que la relation soit réciproque entre parenté consanguine reconnue et mode d'action adéquat : si bien que celle-ci atteste de celle-là, et que les individus envisagés eussent-ils été parfaitement étrangers l'un à l'autre avant l'acte sont dorénavant apparentés par le sang à tout point de vue fors la généalogie. C'est là précisément ce qu'implique la construction symbolique d'un univers social.» (p. 60-61).
Sahlins prend l'exemple de la résidence patrilocale (forme familiale observée au sein de 34 % de la population mondiale en 1967) pour montrer que ce qui prime la parenté génétique, c'est la parenté spatiale, c'est-à-dire le voisinage :
- Suivant cette règle, les couples récemment mariés font partie de la maisonnée du père du mari, ce qui engendre une famille étendue, composée d'un homme, de sa femme, et de ses fils mariés avec leurs épouses et leurs enfants. []. Le hameau local [] se compose de plusieurs familles de ce type, dont les chefs sont d'ordinaire, frères ou fils de frères. Un homme jeune se trouvera donc coopérer avec ses cousins au premier degré (r = 1 / 8) ou d'un degré supérieur (r = 1 / 32, 1 / 64, etc.) des oncles (FP, r = 1 /4) peut-être bien des grands-oncles (FPP, r = 1 / 8). Dans le même temps, la soeur (r = 1/ 2) de ce même jeune homme va aller vivre avec son mari après ses noces, élevant des enfants ( r = 1 / 4) dans la maisonnée de celui-ci; tandis que la soeur de la mère (r = 1 / 4), en toute probabilité, a toujours vécu dans une autre localité, de même que la tante patrilatérale (r = 1 / 4), une fois mariée. Dans la force de l'âge, notre garçon perdra, de la même manière, sa fille (r = 1/ 2) et ses enfants (r = 1 / 4), de même que toutes les femmes venant à naître dans son propre groupe familial étendu. Ainsi donc, dans la mesure où un homme favorise un parent "par le sang" de son propre groupe, il le fait aux dépens de ceux d'un degré identique, voire plus proche qui n'en font pas partie. [] Quel que soit le degré de parenté généalogique, les catégories de distance consanguine subissent l'inflexion pragmatique de la résidence, d'autant que l'appartenance au même groupe domestique est une composante fondamentale de l'identité sociale.» (p. 64-65).
- [] ces choix témoignent de la qualité distinctive de l'ordre culturel, en tant que force symbolique de création, à laquelle il n'appartient pas d'être l'expression d'une quelconque parenté naturelle mais bien plus, et au premier chef, d'instituer la parenté comme forme sociale.» (p. 76).
Sahlins décrit une série d'exemples qui corroborent tous la conclusion à laquelle Sahlins parvient p. 83-84 :
- Les faits ethnographiques montrent que les personnes appartenant aux groupes de parenté, qui organisent la reproduction chez l'homme, seront plus proches, généalogiquement parlant, d'individus extérieurs au groupe, qu'ils ne le sont de certains de ceux qui en font partie.»
223. Exemples :
- En Afrique orientale, au Soudan, il est des hommes qui se marient après leur mort, et des femmes stériles qui sont pères de famille. Pour les Nuer, une femme qui ne produit pas d'enfants est à considérer comme un homme. Si elle peut accumuler du bétail redevances du prix de la fiancée, ou rétribution de ses activités de magicien - , elle épousera une autre femme (voire plusieurs) par les rites habituels du mariage. Ses femmes seront fécondées par un parent, un ami, un voisin, ou un homme appartenant à une autre tribu subordonnée (les Dinka). Mais le père biologique n'est que le géniteur de ses enfants ; c'est bien la femme qui en est le père véritable, juridique (le pater), tout comme elle est, juridiquement, le mari de leurs mères.» (p. 76)
- Quant au mariage fantôme, il fonde une famille se composant du fantôme au nom duquel sont célébrées les cérémonies du mariage avec ses femmes, ses enfants, et le géniteur des enfants, d'ordinaire un frère ou un des proches du défunt, de son lignage.» (p. 77)
- L'essentiel, c'est que, pour l'humanité, la survie n'apparaît pas en termes de vie et de mort ou du nombre de gènes transmis à la postérité. Les êtres humains ne perpétuent pas leur être physiologique, mais leur être social. La mort n'est pas la fin pour un homme, elle n'est même pas la fin de ses facultés de se reproduire. Seuls les hommes sont immortels. Ils se survivent par leur nom et dans la mémoire de ceux qu'ils ont quittés, ainsi que sous la forme d'esprits, éventuellement capables de goûter tous les plaisir des vivants (peut-être mieux encore). [] Et dans bien des sociétés humaines, la perspective d'une telle existence peut, sa vie durant, motiver un homme à des actions qui seront tout, sauf égoïstes.» (p. 78).
Sahlins s'arrête sur le cas de la Polynésie, dans la mesure où c'est, à sa connaissance, la seule société, hormis la société occidentale, où la filiation est considérée comme provenant pour moitié du père et pour moitié de la mère. Là encore, il note combien l'analyse en termes sociobiologiques s'accordent mal avec les faits ethnologiques, en particulier quand il en vient à décrire deux pratiques courantes des sociétés polynésiennes : l'infanticide de sa propre progéniture et la pratique - très répandue - de l'adoption de la progéniture d'autrui - en particulier des fils des ennemis morts au combat (cf. p. 98). L'explication de tels pratiques vient de ce que le fils premier né était socialement avantagé par rapport à ses germains (contrairement à la théorie sociobiologique qui établit que chaque enfant, possédant la même proportion de gènes que les autres, devrait recevoir un traitement semblable à celui des autres) qui avaient moins de chances de se marier mais à qui il était permis d'avoir des rapports sexuels, pourvu que ceux-ci ne débouchent pas sur des naissances :
- L'infanticide était pour part une solution au problème du fils cadet. Pour une autre part, l'infanticide venait résoudre le problème, politique au même titre, qu'aurait posé la présence d'enfants naturels procédant d'une filiation de rang élevé, au sein des ordres inférieurs de la population - ce qui était, à son tour, la conséquence des privautés sexuelles des individus de rang élevé. A Tahiti spécialement, on tuait d'ordinaire les rejetons de parents de rangs différents. (Il n'y a donc pas lieu de croire que l'avantage accordé à un enfant, au détriment des autres, aurait constitué une réponse adaptative à la pénurie [...] puisque cette pratique augmentait en même raison que le rang social, à mesure donc, que s'accroissaient les droits de priorité et de préemption sur les ressources.» (p. 100-101)
23. Conclusions
Sahlins tire plusieurs conclusions de son analyse des exemples qu'il donne :
231. Il n'y a pas de coefficients de liaison génétiques dans les sytèmes humains de rapports de parenté :
- Aucun système de rapports de parenté ne suit, chez l'homme, un agencement conforme aux coefficients de liaison génétiques tels que les sociobiologistes les envisagent.» (p. 111).
232. Dans l'espèce humaine, ce sont les rapports de parenté qui commandent l'action sociale qui relève d'un autre calcul que celui de type "sélection de parenté" :
- [...] comme ce sont les rapports de parenté, constitués sur le plan culturel, qui président aux processus effectifs de coopération à la production, de propriété, d'aide mutuelle, et d'échange matrimonial, les systèmes ordonnant l'avantage reproductif chez l'homme ne relèvent aucunement d'un mode de calcul prévu par la sélection de parenté, ni - conséquence logique, par une sélection naturelle répondant aux canons de l'égoïsme.» (p. 112)
233. La parenté est une donnée spécifiquement culturelle qui n'est pas limitée à la parenté génétique :
- [...] la parenté est une caractéristiques des seules sociétés humaines, qui se distingue précisément par cette autonomie vis-à-vis des relations naturelles. Quand les sociobiologistes font appel au terme de "parenté" (kinship) entendant par là une connexion "par le sang", c'est dans l'idée d'invoquer un commun langage - et l'expérience commune - des hommes et des animaux, ou, à tout le moins, des hommes en tant qu'ils sont des animaux. Ils imaginent que ce concept pré-babélien ne renvoie à rien d'autre qu'aux choses de la vie : une suite d'actes de procréation, renvoyant les uns aux autres, nécessairement soumis à la sélection naturelle. Mais la pratique culturelle reprend la naissance comme métaphore de la parenté, et non la parenté comme expression de la naissance. La naissance n'est rien, abstraite du système de parenté qui la définit.» (p. 114)
234. Seuls les systèmes sociaux se reproduisent et non les individus :
- [...] il s'ensuit que les êtres humains ne reproduisent pas simplement leur être physique, ou biologique, mais bien leur être social : non point au titre d'expressions - se constituant en médiation - d'un ADN entrepreneur mais au titre de membres de familles et de lignages, et en leur capacité de cousins croisés ou de chefs. Il s'ensuit de même que dans les ordres culturels des hommes, il n'y a pas reproduction d'êtres humains en tant qu'êtres humains, mais bien du système de groupes sociaux, de catégories sociales, et de rapports sociaux, au sein duquel ils mènent leur existence.» (p. 117)
235. C'est la fonction symbolique qui doit rendre compte de la spécificité culturelle dans l'espèce humaine :
- [...] la culture est la condition indispensable de ce système d'organisation et de reproduction des hommes, avec tous ses pièges pour le tenant d'une théorie biogénétique du comportement social. La société humaine se fonde sur la culture ; son unicité tient au fait que sa construction fait appel à l'outil symbolique. [...] Les êtres humains ne se définissent pas, sur le plan social, par leurs qualités physiologiques mais en termes d'attributs symboliques ; et un symbole consiste justement en une valeur dotée d'une signification - telle que "proche parenté" ou "sang commun" - qui ne saurait être déterminée par les propriétés physiques de ce qu'il désigne.» (p. 118-119).
236. La nature de la fonction symbolique est intimement liée au langage qui distingue radicalement (et non par degré) l'espèce humaine des autres espèces :
- Wilson admet du bout des lèvres (si l'on peut dire) ce fameux "arbitraire du signe". Mais, dans son idée, l'importance théorique du langage, chez l'homme, tient à sa fonction de communication, bien plus qu'à sa structure de signification, de sorte qu'il est envisagé avant tout comme transmetteur d'information, bien plus que comme générateur de sens. En tant que communication, le langage ne se distingue pas de la masse des signaux émis par l'animal : il ne représente qu'un acroissement (quantitatif) de la capacité d'émettre des signaux. Ce que le signal porte, c'est une information - mesurable, suivant la théorie classique, à la modification effective du comportement qu'elle produit chez le récepteur, comparée à une conduite qui eût été plus probable en son absence.» (p. 119).
- Chez l'homme, la communication ne se réduit pas au syndrome stimulus-réponse, voué à refléter les impératifs matériels de survie. En effet, l'objectivité même des objets est détermination culturelle, générée par attribution de signification symbolique à certaines différences "réelles", alors même que d'autres ne sont pas prises en compte. C'est sur la base d'une telle segmentation, d'un tel découpage, que le réel est constitué systématiquement.[...] Encore une fois, dans cette optique, la culture doit s'entendre comme intervention dans la nature, plutôt que comme auto-médiatisation de celle-ci au travers de symboles.» (p. 120-122).
- Si l'on demandait comment un système donné de parenté, de chefferie, ou de croyances religieuses, en est venu à acquérir ses propriétés, il faudrait faire appel à une théorie de l'attribution symbolique.» (p. 124).
237. Biologie et ordre symbolique : l'exemple de la perception des couleurs :
- Comment la biologie intervient-elle donc dans la culture ? Au niveau le plus banal, en imposant un ensemble de limites naturelles aux fonctions des êtres humains. Au niveau le plus décisif, la biologie des hommes met à la disposition de la culture un ensemble de moyens pour la construction d'un ordre symbolique. [...] Un des aspects les mieux étudiés de cette question est celui de la pereption des couleurs (Berlin et Kay 1969). J'ai traité par ailleurs de la question des universaux de couleur, de façon détaillée (Sahlins, 1976a) [...]. La structure de la perception fournit à l'homme les données naturelles d'un projet culturel, et en particulier, dans ce contexte, les paires - caractérisées par leur unicité et leur complémentarité chromatiques - du rouge et du vert, du jaune et du bleu.» (p. 127).
Deuxième partie : Biologie et idéologie
3. Transformations idéologiques de la "sélection naturelle"
31. Sélection naturelle et optimisation
La thèse de Sahlins consiste à montrer que le concept darwinien de sélection naturelle a été parasité par la notion de concurrence, omniprésente dans l'idéologie économique libérale :
- On pourrait dire que le darwinisme, d'abord repris sous forme appropriée à la société, en tant que "darwinisme social", est revenu à la biologie en tant que capitalisme génétique.» (p. 132)
Cela a de conséquences sur la façon de concevoir la sélection naturelle : jusqu'à présent, on interprétait la sélection comme favorisant tout avantage reproductif inscrit dans le génotype d'un ou de plusieurs individus et qui assurait à chaque génération, selon les conditions extérieures du milieu, un descendant de plus que les autres génotypes. La théorie récente à laquelle se réfère la sociobiologie consiste à enlever à la sélection son rôle de force directrice de l'évolution et à la remplacer dans ce rôle par le concept économique de maximisation du profit individuel : la sélection n'est plus que le moyen dont se sert l'ADN pour s'optimiser au fil des générations :
- La force directrice de l'évolution, d'abord attribuée aux conditions extérieures de milieu, passe ainsi à l'organisme lui-même. Dans le stade ultime de ce déraillement idéologique, la sociobiologie conçoiot la stratégie sélective - pour autant qu'elle se traduit dans les interactions sociales - comme appropriation des forces vitales d'autres organismes au profit de la reproduction de l'intéressé. En dernier essort, la sélection naturelle subit une métamorphose, passant de l'appropriation des ressources naturelles à l'expropriation des ressources d'autrui. » (p. 133).
Or le concept de sélection naturelle se distingue de la notion de maximisation car la sélection naturelle décrit comment des traits phénotypiques ont tendance à se répandre dans une population mais elle ne dit pas du tout que ces traits vont tendre à l'opitimisation structurelle :
- Pour qu'une telle tendance orthogénique se manifeste, il faut stipuler des conditions supplémentaires, qui sont tout aussi étrangères à la définition de la sélection, qu'elles sont improbables empiriquement : la plus courante étant que les conditions sélectives pour lesquelles ces traits ont valeur d'adaptation durent suffisamment longtemps pour que les modifications génétiques requises surviennent. Mais, une fois de plus, le principe de sélection ne stipule pas que le milieu (la pression de sélection) reste constant pendant un intervalle donné, encore moins pour une durée permettant une "accomodation" génétique optimale.» (p. 138)
Une mutation apparaît toujours de façon aléatoire et indépendamment du milieu par rapport auquel pourrait se définir une accomodation optimale. Inversement, les modifications du milieu se font sans rapport avec l'adaptabilité des organismes qui y vivent. D'où la conclusion :
- C'est l'indétermination, et non la maximisation, qui est la nature du changement évolutif.» (p. 139)
Sahlins en tire une interogation sociologique :
- Tous les savants occidentaux se gaussèrent de la biologie de Lyssenko. Se pourrait-il que quelque chose de semblable se produise dans notre société ? » (p. 142)
32. Exemple
L'exemple choisi par Sahlins est celui du frai de la femelle du saumon du Pacifique, parce que c'est un exemple choisi par les sociobiologistes eux-mêmes. La femelle pond un nombre considérable d'oeufs ; pourquoi ?
- Il se trouve que Williams et Wilson nous porposent le même type d'explication du phénomène. [...]. On peut décrire ce raisonnement comme une méthode permettant de réintroduire au sein de l'adaptation, le vieux cauchemar de la téléologie, en décidant abitrairement que certaines fonctions ou certaines structures d'un organisme existant sont des préalables, en quelque sorte donnés par avance; si bien que le problème de l'évolution est désormais posé par l'organisme lui-même, en l'occurrence par la nécessité de rendre plus efficaces ces systèmes, une fois donnés. [...] Ainsi, on considère qu'il est donné que la femelle du saumon, affaiblie à l'issue de sa longue nage à contre-courant, ne fraiera qu'une seule fois. Cela étant, il y aura avantage sélectif à ce qu'elle ponde autant d'oeufs que possible dût-elle en mourir, afin de maximiser les chances de laisser une descendance viable [...]. (p. 146).
Or on note également au moment de l'optimisation de ses capacités ovariennes, une atrophie du tube digestif, incompatible avec sa survie individuelle :
- Autrement dit, en considérant comme inévitable que le frai s'effectue en une seule fois, il tombe sous le sens que l'évolution procède à la maximisation des conduits reproducteurs, aux dépens des conduits digestifs» (p. 147).
Sahlins pose alors la question de savoir pourquoi, si la sélection va jusqu'à atrophier le tube digestif d'un organisme, aux fins de lui permettre une explosion d'activité reproductrice unique, dont il mourra, ne pourrait-elle pas tout aussi bien opérer des changements de structure permettant de frayer plusieur fois ?
- Mais - et c'est bien là le hic - cette voie, ou une autre, n'a pas été rejetée par sélection naturelle, mais par analyse sélective. On a considéré que le saumon était un être doté de limites préalables, et pour lesquelles le problème évolutionniste d'allocation de ressources en vue de l'aptitude n'était susceptible que d'une seule solution - à partir d'une prémisse qui ne se fondait pas sur l'évolution elle-même.» (p. 149).
33. Sélection naturelle et réciprocité
La sociobiologie franchit une nouvelle étape quand elle essaye de penser la notion de société à partir de la notion de gain individuel. Pour ce faire, elle considère de la même manière la sélection de parenté et la notion d'"altruisme réciproque", en soutenant que l'altruisme réciroque a le même effet pour l'individu que la sélection de parenté. Sahlins cite Trivers ("The evolution of reciprocal altruism", Quaterly Review of Biology, 1971, 46 : 35-57, p. 48) :
- il n'est besoin d'aucun concept d'avantage de groupe pour rendre compte du comportement altruiste de l'homme»
Trivers suppose que l'altruisme est apparu et s'est maintenu au cours de l'évolution parce que dans tout ensemble d'organismes génétiquement disposés à coopérer, chaque individu accroît son espérance de vie et tend ainsi à répandre à terme ses gènes altruistes-réciproques. Mais Sahlins remarque aussitôt que c'est le groupe des individus étabissant des liens de réciprocité qui possède un avantage et non pas un individu en particulier :
- C'est donc le lien entre les organismes n'entrant pas en compétition sur le plan génétique - c'est-à-dire s'accommodant, par transaction individuelle, de la parité avec certains concurrents génétiques - qui produit l'avantage sélectif.» (p. 152)
L'altruisme généralisé ne produit donc aucun avantage différentiel sur le plan de l'aptitude individuelle et à partir de là, Trevers doit admettre que tous les actes individuels, qu'ils confèrent ou non à l'individu un avantage adaptatif, peuvent être considérés comme adaptatifs. Mais alors :
- Si ego fait preuve de bonté envers ses consanguins, c'est au bénéfice de sa propre aptitude globale ; si, au contraire, il aide un inconnu plutôt qu'un parent, il en tirera encore un avantage, sous forme d'altruisme réciproque [...] dès lors que deux hypothèses différentes nous sont présentées - comme c'est le cas ici - se proposant chacune de rendre compte de phénomènes contradictoires, sur la base d'un seul et même principe, nous pouvons être assurés que les hypothèses elles-mêmes sont contradictoires entre elles.» (p. 150-151)
Trivers en conclut que les dispositions psychologiques et sociales des hommes telle qu'elles ont émergé puis se sont maintenues, visent, elles aussi, l'intérêt adaptatif : que ce soit la compassion, la gratitude, la bienveillance ou, au contraire, la suffisance, l'agression morale ou la dissimulation :
- En d'autres termes, le système de relations se déplace constamment pour réaliser un équilibre de réciprocité, tout en étant menacé, non moins constamment, de déséquilibre - l'une et l'autre de ces tendances étant avantageuses, suivant des perspectives divergentes.» (p. 154)
34. Exemple
L'exemple de Trevers est celui de la stratégie de reproduction des oiseaux, qu'il essaye de fonder sur la maximisation individuelle. Il soutient qu les mâles ont avantage à chercher à féconder le plus de femelles possibles, tandisuqe la femelle, ayant investi dans sa progéniture en gestation puis une fois éclose tient le calcul inverse puisque c'est son vantage de rentabiliser son investissement. Et toute réussite de la part de la femmelle serait aussi une réussite de la part du mâele qui serait parvenu à répandre ses gènes. Mais Sahlins fait remarqur que si tlle était la stratégie des maâles, il fudrait introduuire un autre facteur : la pénurie des femelles et docnc aussi l'accroissement du taux de mortalité des mâles. Sahlins conclut :
- Dans les faits, la plupart des espèces d'oiseaux sont monogames. Trivers donne en exemple divers modes de relations sexuelles, pris dans différentes espèces d'oiseaux. Mais aucun de ces modes ne saurait se prévaloir d'une quelconque supériorité, sur le plan de l'intérêt reproductif du particulier. Car, pour autant que les mâles "investissent" plus, ils procréeront moins, mais ils verront leur vie, comme celle de leurs petits, prolongée en conséquence.» (p. 161).
4. Dialectique populaire de la nature et de la culture
La culture occidentale n'a pas attendu la "nouvelle synthèse" de 1975 pour élaborer une dialectique particulière du rapport nature / culture : l'action humaine a été pensée en termes naturels et les lois de la nature ont été fondées dans nos conceptions de l'action sociale humaine.
- Nous sommes apparemment prisonniers de ce mouvement perpétuel de va-et-vient entre la culturalisation de la nature, et la naturalisation de la culture.» (p. 182).
C'est le cas par exemple du Léviathan de Hobbes dont les premiers chapitres présentent un homme-machine automoteur et autodirecteur qui se dirige vers les choses qui permettent sa propre perpétuation et qu'il considère dès lors comme socialement "bonnes". Mais le calcul social du bien est relatif car il suppose une comparaison avec autrui et donc aussi un affrontement avec lui. L'individu est conçu comme son propre prorpriétaire, la société se réduisant à un rappport d'échanges entre propriétaires.
- Dans les sciences sociales - c'est le cas de la sociobiologie - il n'est que trop facile, dès lors, de transférer cet économisme de marché, natif de notre civilisation, de l'analyse de la société capitaliste à l'explication de la société tout court.» (p. 171)
Dès lors, la société peut se déduire de l'action rationnelle des individus, la pensée n'étant qu'un moyen de représentation d'une fin inhérente à l'individu pensé comme être naturel :
- La sociobiologie procède précisément de la même prémisse. C'est Hobbes qui posa, à l'origine, le fondement d'une telle subordination du symbolique au naturel, en replaçant la société qu'il connaissait à l'état de nature. [...] l'évocation de l'homme en l'état de nature, que l'on trouve chez Hobbes, constitue manifestement le mythe d'origine du capitalisme occidental. Devant cette vision, la Genèse est éclipsée, dans la pratique sociale contemporaine.»
- Autant que je le sache, nous sommes la seule société du monde à penser qu'elle s'est élevée à partir d'un état de sauvagerie, identifié à une nature impitoyable. Tous les autres peuples se croient de descendance divine. Même si les dieux en question ont une représentation naturelle, ils n'en ont pas moins des attributs surnaturels. A en juger au comportement social, cette opposition pourrait bien traduire assez fidèlement ce qui nous distingue du reste du monde.»
C'est depuis le XVIIème sicèle que s'est cosntituée cette dialectique que Sahlins appelle aussi "cercle vicieux" (p. 175)
- où l'on applique à tour de rôle le modèle de la société capitaliste au règne animal, avant d'appliquer ce règne animal embourgeoisé à l'interprétation de la société humaine.» (p. 175)
Pour Sahlins, la sociobiologie qui pousse un tel cercle vicieux à l'extrême doit être considéré comme un Totémisme Scientifique (p. 183) puisque le totémisme consiste à expliquer les différences entre groupes humains par référence aux distinctions établiées entre espèces naturelles.[/color]
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