Kaywren a écrit:
Je disais ça parce que j'ai l'impression, en ce domaine, qu'on tombe vite dans des théories du complot. Pas que je pense que l'Église et l'Église primitive n'aient pas supprimé ou passé volontairement sous silence certains faits, mais je préfère avoir des sources relativement fiables pour éviter de tomber dans un délire da-Vinci-codesque. La non-existence de Jésus excite parfois autant l'imagination que son existence...
Attends attends l'ami. Je ne saurais que te recommander vivement de t'informer ailleurs que chez les historiens de Top Chrétins, car cette phrase :
"Pas que je pense que l'Église et l'Église primitive n'aient pas supprimé ou passé volontairement sous silence certains faits, mais je préfère avoir des sources relativement fiables pour éviter de tomber dans un délire da-Vinci-codesque." ça craint un peu... Excuse-moi pour ma franchise.
L'église est une institution spécialisée dans la destruction, omission et transformation de faits voyons ! C'est même leur matière première pour continuer à exister. arrrf.
Les réserves de prudence que j'ai émises juste au-dessus concernent uniquement l'objet "cet ouvrage-ci" en particulier", au coup par coup, dont il est toujours utile de vérifier l'exactitude par ouvrage ou auteur cité. Mais plus globalement, on parle dans ce topic du
plus grand génocide culturel connu et avéré, qui fut bel et bien perpétré par les chrétientés (plurielles) au pouvoir - à des époques où le pouvoir religieux était intimemment lié aux autres. Tu n'auras donc aucune peine à trouver des sources par centaines, voire par milliers. Plus facilement encore si tu cherches par le mot-clé historique "autodafés".
Encore une fois, le texte du dessus est largement incomplet. Au premier coup-d'oeil, on remarque que les ouvrages mayas et aztèques, tous systématiquement détruits par les conquistadors, manquent dans sa liste... Manquent aussi dans cette liste décidément incomplète, toutes les historiques crémations de livres organisées par l'inquisition espagnole et portugaise dans la péninsule. Un des objectifs de Torquemada était d'extirper l'Espagne de TOUT livre non chrétien... !! (exceptés peut-être les quelques ouvrages platoniciens dont l'église avait besoin pour sa métaphysique). On rigole plus, car il avait presque réussi : A Grenade, peu après sa prise en 1492, les musulmans sont convertis de force ou bannis, et sommés d'apporter eux-mêmes TOUS leurs ouvrages hérétiques afin de les passer par le feu. Les autres ouvrages avaient déjà été détruits dans les autres villes reconquises depuis longtemps.
Torquemada a tellement réussi sa mission qu'on ne peut même plus citer les auteurs ni les ouvrages disparus (qui manqueront par conséquent dans toute liste...) car il n'en reste aucune trace. Seule une quantification existe parfois (600 ouvrages israélites détruits rien qu'à Salamanca, dans un seul couvent) ! L'Espagne en cette époque de fin de reconquête avait systématiquement détruit quasiment TOUTE trace de présence non chrétienne en Espagne... Ne reste quasiment que Cervantes et quelques rares autres auteurs de cette catastrophe culturelle : livres juifs, muslims, aztèques, art, architecture, toute trace de non-chrétienté passera par le feu dans les "deux moitiés du monde sous contrôle" des espagnols et portugais... On utilisera les briques des monuments arabes pour construire des couvents, dont on retrouve souvent la trace des arabesques sous les pavés, et même les fameux azulejos (des tuiles ou mosaïques d'un bleu caractéristique à l'art mozarabe). Des destructions massives indéniables, mais les livres brûlent encore mieux.
Ce n'est pas de l'anticléricalité primaire. Destructions systématiques d'ouvrages qui dépassent largement l'hexagone et le débat de l'historicité de Jésus, ou un quelconque engouement anticlérical ou théorie du complot. Ca date pas d'hier et c'est un comportement qui fut d'une telle ampleur selon les époques, qu'il faudrait être le dernier des ignares pour le mettre en doute. Rien qu'une promenade dans un musée d'art et d'histoire, suffit à trouver des éléments probants de cette catastrophe culturelle. C'est dire si elle fut généralisée.
Observe bien l'image... C'est pas du rôti qui brûle, mais des exemplaires du talmud.
Faudrait pas non plus inverser les charges. Ce ne sont pas tant les
anticléricaux qui fabriquent les méfaits de la très sainte cathoprotestante église (ça peut arriver, mais pourquoi faire tant il est facile de trouver des méfaits), mais plutôt leurs nombreux méfaits passés qui justifient une anticléricalité de bon aloi, hein.
La crémation de livres hérétiques ou diaboliques est récurrente et inféodée au christianisme lui-même. Commencée dès le début du christianisme, par des édits dirigés contre les juifs - existant déjà ailleurs en d'autres cultures - puis systématisée sous des rituels plus
légalistes par Torquemada, dirigée et contre le juif et contre l'arabo-berbère musulman, et contre tout non chrétien. Encore aujourd'hui, les amish américains et d'autres fondamentalistes pratiquent la destruction, en clans ou en famille, de tout ouvrage hérétique. C'est un phénomène intimement lié à la psychologie des religions véhiculant l'opposition divin-diabolique. L'attitude de rejet d'un livre dérangeant (que l'on n'a pas lu...), sous le prétexte que l'auteur serait agronome, je l'ai observée chez une de tes proches. arfff. Brûler les livres n'est qu'une application plus physique de ce même rejet.
Je rappelle simplement que c'est la sainte église catho elle-même qui s'en glorifiait et relatait, archivait, éditait et ordonnait ces autodafés d'ouvrages considérés hérétiques, immoraux, etc. et opportunité aidant, leurs propres auteurs auraient servi de combustible. Des contemporains au gentil et bien con Blaise Pascal (dont lui-même) ont écrit à ce sujet au XVe s. époque où depuis bien longtemps, le terme autodafé avait été transféré sur la crémation des hétériques eux-mêmes et non seulement des ouvrages hérétiques. Les bûchers ont toujours servi et pour les hérétiques et plus anciennement pour y brûler des objets honnis par l'église. Autant catho que protestante, qui brûlaient les livres les uns des autres respectivement. Ils n'ont pas fait que se taper dessus et s'excommunier les uns les autres, au nom du même dieu. arf arf. Tu peux constater cette même démarche (in)intellectuelle sur Top-C, où certains vont jusqu'à qualifier les arts martiaux japonais de diaboliques. P'tain.
Des centaines de sources, même directes, témoignent de ces autodafés. Dans certains passages de Montesquieu, de Voltaire, et plus anciennement, on y lit des références à ces époques de destruction de livres par l'église. En Espagne, des témoignages fusent, nombreux, très nombreux - plus anciens ou récents, par d'autres auteurs - qui témoignent de ces destructions et de cette terreur provoquée par l'église, qui affecta jusqu'à l'expression artistique. Certains croquis de Goya, exposés au musée du Prado, font le tour par l'image de ce que l'église y avait commis en Espagne avant son époque - dont brûler des sorcières, des hérétiques, et des livres en place publique.
C'est finalement un procédé assez caractéristique aux dictatures : interdire et détruire le subversif, ce qui remettrait en cause leur pouvoir. Appelés hérétiques par les religieux, appelés subversifs par les généraux... C'est le même procédé. Avec leurs foyers publics de livres d'auteurs juifs dans les rues de Berlin, les nazis n'ont rien inventé.