LES
DROITS DE L'HOMME À TOMBEAU OUVERT
Question des cimetières musulmans
en Suisse
Sami
A. Aldeeb Abu-Sahlieh
Docteur en droit, responsable du droit arabe et musulman
Institut suisse de droit comparé, Lausanne, Suisse
Le droit musulman prescrit d'enterrer le mort
là où il meurt. On doit accepter le destin que Dieu
lui réserve. Selon Mahomet, chaque personne, lors de sa création,
est mélangée avec de la terre qui lui est prédestinée
comme tombe . Les légistes classiques ont cependant permis,
avec réticence, le transfert du mort dans les villes saintes
- la Mecque, Médine, Jérusalem, etc., - pour bénéficier
de leur bénédiction .
On estime qu'entre 90 et 95% des morts musulmans sont rapatriés
dans leurs pays d'origine, et ce rapatriement peut coûter
jusqu'à 15'000.- Sfr. . Pourquoi un tel rapatriement? Des
musulmans répondent que la Suisse ne leur accorde pas le
droit de s'y faire enterrer selon leurs normes. C'est ce que nous
verrons ici sommairement, renvoyant le lecteur à un ouvrage
"Cimetière musulman en Occident".
1)
Séparation des tombes: sous la terre comme sur la terre
A) Normes musulmanes
Le
droit musulman partage le monde sur la base de la religion. Il y
a d'un côté la Terre de l'Islam (dar
al-islam) et de l'autre, la Terre de la guerre (dar
al-harb), appelée, souvent la Terre de la mécréance
(dar al-kufr), qui peut bénéficier
d'un traité de paix temporaire devant ainsi Terre de traité
(dar ahd). Mais un jour ou l'autre, elle doit tomber sous le pouvoir
musulman. A l'intérieur de la Terre d'Islam, on retrouve
une autre division religieuse. Il y a les musulmans, les Gens du
livre (juifs, chrétiens, sabéens, zoroastriens et
samaritains) qui ont le droit de vivre en Terre d'Islam avec des
restrictions notamment en matière de liberté religieuse
et de droit de famille. Les musulmans les tolèrent avec l'espoir
de les voir un jour se convertir à l'islam. Ceux qui n'appartiennent
pas à ces deux catégories, à savoir les polythéistes,
n'ont pas le droit de vivre en Terre d'Islam, selon le droit musulman
classique. D'autre part, il ne peut exister dans la péninsule
arabique que des musulmans. Ce système n'a pas totalement
disparu même s'il a connu des modifications à travers
les siècles. Ainsi il y a des chrétiens qui travaillent
en Arabie, mais ils n'ont pas le droit d'y pratiquer leur religion.
En règle générale, le musulman doit vivre dans
la Terre de l'Islam, et ne peut se rendre dans la Terre de la mécréance
qu'en cas de nécessité.
Le droit musulman prescrit entre les morts la division qui existe
entre les vivants. Les musulmans doivent être enterrés
dans un cimetière qui leur est propre, et il est interdit
d'enterrer un mécréant avec eux. Selon Mahomet, le
mort subit le châtiment ou jouit de la félicité
déjà dans la tombe. De ce fait, il faut éviter
de mettre un croyant près d'un mécréant pour
qu'il ne souffre pas de son voisinage. Mahomet aurait dit aussi:
"Je suis quitte de tout musulman qui est avec un polythéiste"
. Si une chrétienne meurt enceinte des uvres d'un musulman,
elle doit être enterrée dans un lieu à part,
ni dans le cimetière des musulmans (pour que ces derniers
ne subissent pas un préjudice par sa présence), ni
dans celui des chrétiens (pour que l'enfant, supposé
musulman, ne subisse pas un préjudice par leur présence)
.
L'apostat est jeté dans une fosse "comme on jette un
chien". Et s'il a un parent musulman, il serait préférable
de le lui laisser pour le laver comme on lave une robe impure et
l'enrouler dans un habit usé . Quant aux suicidés
et condamnés à mort pour une autre raison que l'apostasie,
ils sont enterrés dans le cimetière musulman, mais
l'imam en personne ne priera pas pour eux en signe de désapprobation
de leurs délits .
Le mécréant est enterré dans le cimetière
des mécréants. Un musulman ne s'occupera de son père
mécréant que s'il n'y a personne d'autre. Il ne priera
pas pour lui. Le Coran ordonne: "Ne
prie jamais pour l'un d'entre eux quand il est mort, ne t'arrête
pas devant sa tombe. Ils ont été incrédules
envers Dieu et son Prophète et ils sont morts pervers"
(9:84) .
Il est interdit d'enterrer un mécréant
en Arabie. Et si on l'y enterre, on doit l'exhumer et le rapatrier
parce que, selon Mawerdi, "l'inhumation équivaut à
un séjour à demeure" . Une fatwa saoudienne précise
que si on ne peut pas remettre le corps du mécréant
à l'ayant droit ou le membre amputé à son propriétaire
pour qu'ils les sortent hors du pays, ils seront enterrés
dans un terrain anonyme sans propriétaire .
Le droit musulman ne permet pas au musulman de séjourner
en Terre de mécréance, sauf en cas de nécessité.
Certains considèrent un tel musulman comme apostat et lui
refusent un enterrement dans un cimetière musulman . Ne pouvant
pas empêcher les musulmans d'aller en Terre de mécréance,
il fallait empêcher qu'ils soient enterrés dans un
cimetière des mécréants. Le Guide du
musulman à l'étranger indique:
Il
n'est permis d'enterrer un musulman dans un cimetière des
mécréants que s'il n'y a pas de cimetière
propre aux musulmans et qu'il n'est pas possible de le transférer
dans un pays musulman proche. Et si par la suite il devient possible
d'exhumer le musulman pour le transférer dans un cimetière
musulman, cela devient une obligation .
Après un long débat, l'Académie du droit
musulman qui dépend de l'Organisation de la
conférence islamique a décidé que l'enterrement
dans le cimetière des mécréants n'est possible
qu'en cas de nécessité . La Commission de fatwa
saoudienne permet de se faire enterrer dans un cimetière
musulman dans un pays mécréant mais rappelle au passage
que les musulmans doivent en principe quitter la Terre de mécréance
pour la Terre d'islam. Ne peut y rester que le musulman qui
connaît les normes de l'islam, se sent en sécurité
pour lui et pour sa religion et uvre à la propagation
de l'islam . Concernant un cas survenu en France, la Commission
dit que s'il n'y a pas de cimetière musulman et qu'il n'est
pas possible de transférer le mort, il faut lui chercher
un lieu dans le désert (sic) pour l'y enterrer; sa tombe
sera nivelée afin que le mort ne soit pas exhumé .
B) Normes suisses
La
Fondation des cimetières islamiques suisses,
créée en 1987 par des Suisses convertis, a envoyé
en 1993 quelque 900 lettres aux communes romandes en vue de l'obtention
de cimetières ou de carrés réservés
exclusivement aux musulmans . Ces démarches sont restées
sans résultat. La lettre circulaire était accompagnée
d'un aide-mémoire qui précise: "Les tombes des
musulmans doivent occuper un emplacement spécifique dans
le cimetière, à l'écart des tombes des morts
d'autres religions". Dans une feuille de la Fondation
culturelle islamique, il est indiqué:
La Tradition islamique recommande que le mort soit enterré
près du lieu de sa mort: "Enterrez les morts où
leurs âmes les ont quittés" (récit de
Mahomet). Le transfert sans aucune raison valable n'est pas recommandé
(sauf par exemple si le musulman est décédé
dans une ville où il n'existe pas de cimetière islamique)
Le meilleur endroit est un cimetière pour pouvoir y bénéficier
des prières des visiteurs. Il est strictement interdit
d'enterrer un non-musulman avec des musulmans, comme le contraire.
Toutes les écoles sont d'accord sur ce point. Cette obligation
religieuse exige l'exclusivité dans la mesure du possible.
Il ne s'agit en aucun cas de ségrégation comme certains
se plaisent à le déclarer. En islam, il y a d'autres
obligations religieuses où il est possible à un
non-musulman de participer ou d'en bénéficier (par
exemple lors de réjouissances) ainsi que dans certaines
pratiques religieuses recommandées telles que la charité
(sadaqah) .
Au lieu de donner la véritable raison pour laquelle le musulman
ne doit pas être enterré près d'un mécréant,
la Fondation culturelle islamique avance l'argument de la
prière afin qu'on n'interprète pas l'attitude des
musulmans comme une "ségrégation".
Les musulmans accusent la Suisse de les discriminer en leur refusant
un enterrement décent et en les obligeant à transférer
leurs morts à l'étranger à grands frais . En
fait, toute personne qui meurt en Suisse a le droit de s'y faire
enterrer, même si elle est de passage. Le problème
des musulmans est qu'ils refusent de se faire enterrer à
la ligne, dans les cimetières publics, près d'un mécréant.
Ils exigent un cimetière ou un carré séparé
réservé exclusivement à leur usage. Ce faisant,
ils voudraient obliger les cantons à faire marche arrière
et à renoncer à une laïcité chèrement
acquise des cimetières.
Avant 1874 en effet, les cantons avaient des cimetières catholiques,
protestants et juifs, les uns refusant de se faire enterrer chez
les autres. Les catholiques, surtout, refusaient d'enterrer dans
leurs cimetières les non-baptisés, les apostats, les
suicidés, les excommuniés, etc. On retrouve ces normes
discriminatoires dans le Code de droit canon de 1917 et de 1983
. Les juifs aussi refusaient, et refusent toujours - avec des exceptions
-, de se faire enterrer avec les autres. Et si certains permettent
d'enterrer un non-juif près de son conjoint juif, ils lui
interdisent tout signe ou cérémonie non-juifs . Ils
refusent aussi d'y enterrer un juif non circoncis, sauf si on le
circoncit après sa mort .
Pour mettre fin au conflit entre catholiques et protestants, l'article
53 al. 2 de l'ancienne constitution suisse de 1874, en vigueur jusqu'au
31 décembre 2000 (ci-après: aCst) de 1stipule: "Le
droit de disposer des lieux de sépulture appartient à
l'autorité civile. Elle doit pourvoir à ce que toute
personne décédée puisse être enterrée
décemment".
En vertu de cet article, tout décédé, y compris
le suicidé et le non-baptisé, a le droit de se faire
enterrer décemment, indépendamment de sa religion.
Le Conseil fédéral était chargé de veiller
au respect de cette décence par les cantons. Il a été
appelé à trancher de nombreux cas litigieux entre
catholiques et protestants, notamment concernant les non-baptisés,
les suicidés et
les sonneries des cloches lors des
funérailles. Dans ses décisions, il n'a pas exclu
la présence de cimetières privés à caractère
confessionnel, cimetières que les cantons pouvaient accepter
ou refuser de créer. Mais il aspirait à parvenir progressivement
à une unification des cimetières, sans barrière
religieuse, estimant "qu'un cimetière commun, sans distinction
de confession, était certainement le système le plus
conforme à l'égalité des citoyens et le meilleur
de tous pour tempérer les contrastes religieux dans la vie"
. Cette volonté d'unifier les cimetières est présente
dans un projet de loi préparé en 1880 qui allait dans
ce sens. Mais le Conseil fédéral y renonça
pour éviter de froisser la population, lui préférant
des interventions ponctuelles, tout en comptant sur le facteur temps
. Aujourd'hui, ni les catholiques ni les protestants ne disposent
de leurs cimetières propres. Les seuls qui en ont encore
sont les juifs, certains obtenus après 1874. À notre
connaissance aucun cimetière juif n'est devenu un cimetière
commun. Les non-juifs ne peuvent pas s'y faire enterrer alors que
des juifs peuvent se faire enterrer dans des cimetières qui
relevaient jadis des paroisses catholiques ou protestantes.
Invoquant l'exception faite aux juifs dans certaines communes, les
musulmans exigent aujourd'hui des cimetières propres en vertu
de la liberté religieuse et du droit à un enterrement
décent, mais ils évitent soigneusement d'indiquer
les raisons profondes, discriminatoires, qui motivent une telle
demande. Quatre cantons ont déjà été
confrontés à ce problème, à savoir:
Genève, Berne, Bâle-Ville et Zurich.
Genève
À
Genève, il y avait au 19ème siècle des cimetières
pour les protestants et pour les catholiques et un cimetière
pour les juifs à Carouge. En 1876, Genève a adopté
une loi qui considère que les "cimetières sont
des propriétés communales" (article 1 al. 1)
et prévoit que "les inhumations doivent avoir lieu dans
des fosses établies à la suite les unes des autres,
dans un ordre régulier et déterminé d'avance,
sans aucune distinction de culte ou autre" (article 8 al. 1).
En ce qui concerne le cimetière juif, le Grand Conseil a
décidé qu'on allait attendre qu'il soit saturé
et que, quand il le serait, les juifs feraient comme tout le monde.
Et comme les autorités ont refusé d'agrandir ce cimetière,
la communauté israélite a décidé de
construire un cimetière sur le territoire français,
à Veyrier-Étremblières, dont l'entrée
se trouve sur le territoire suisse et les tombes sur le territoire
français.
Cédant à "des pressions politiques" , la
ville de Genève a créé en 1979, en violation
de la loi de 1876, un carré séparé réservé
exclusivement aux musulmans dans le cimetière du Petit-Saconnex
. La nouvelle s'étant rapidement répandue, ce carré
s'est aussitôt transformé de fait en cimetière
islamique cantonal. Au début de l'année 1992, Michel
Rossetti, Conseiller administratif chargé du Département
des affaires sociales, a décidé d'interdire l'inhumation
de tout musulman qui n'était pas domicilié sur le
territoire de la ville de Genève , et que, lorsque le carré
musulman serait saturé, "la loi de 1876 s'appliquerait
indistinctement à toutes les communautés, y compris
à la communauté musulmane" .
Ce faux pas de Genève, qui a consisté à créer
un carré séparé réservé exclusivement
aux musulmans en violation de la loi, continue à provoquer
un débat acerbe dans les instances cantonales et municipales
à Genève , ainsi que dans d'autres cantons, entre
partisans et opposants du cimetière laïque. Et maintenant,
non seulement les musulmans réclament des cimetières
propres, mais également les juifs libéraux, les arméniens
et les anglicans. Pour tenter d'y mettre fin, on ajouta le 19 juin
1997 un al. 3 à l'article 4 de la Loi de 1876 selon lequel
"les emplacements sont attribués sans distinction d'origine
ou de religion". Ce nouvel article renforce l'article 8 al.
1 susmentionné. Cette modification n'a pas pour autant calmé
les esprits, surtout avec l'arrivée de Manuel Tornare, un
athée qui est favorable aux cimetières confessionnels,
en remplacement de Michel Rossetti.
Berne
La
municipalité de Berne a adopté en septembre 1997 un
nouveau Règlement sur les cimetières permettant de
créer des carrés séparés pour les minorités
religieuses ou ethniques (article 3) . En application de cette nouvelle
disposition, le parlement communal de la ville de Berne a accepté
en août 1998 le principe de la création d'un carré
séparé réservé exclusivement aux musulmans
de quelque confession qu'ils soient, à condition d'être
domiciliés dans la ville de Berne ou Ostermundigen ou qu'ils
soient décédés dans un hôpital de la
ville de Berne .
Le 9 novembre 1999, il a été décidé
d'attribuer un crédit de 45'000.- Sfr. à la création
d'un carré séparé musulman pour 250 tombes
au cimetière de Bremgarten . Les musulmans ont accepté
que les tombes soient réutilisées (seulement par des
musulmans), sans évacuer les ossements (ainsi le repos des
morts est assuré), au bout de vingt ans, comme les autres
tombes du cimetière. D'autre part, la commune garantit qu'il
n'y aura pas de cendres (de crémation) ni d'urnes pour les
cendres dans ce terrain. Le carré musulman bernois a été
inauguré en grande pompe en janvier 2000 en présence
des responsables cantonaux et communaux de Berne ainsi que des ambassadeurs
de pays musulmans et de représentants d'organisations socio-culturelles
musulmanes .
Bâle-Ville
Bâle-Ville a modifié en 1996 sa loi de 1931 relative
aux cimetières pour permettre la création d'un lieu
gratuit pour une communauté (article 7 al. 1 litt. c). Ainsi,
un carré séparé fut accordé aux musulmans,
et il est prévu de leur en accorder un autre ultérieurement.
Comme à Berne, les tombes peuvent être réutilisées
(seulement par des musulmans) après la durée légale,
sans que les ossements soient enlevés.
J'ai contacté Emanuel Trueb, responsable des cimetières
dans ce canton, et je lui ai demandé pourquoi il cédait
aux exigences discriminatoires des musulmans. Il m'a répondu
qu'en tant que chrétien il est miséricordieux. Il
estime qu'il faut laisser le temps aux musulmans pour s'adapter.
Progressivement, estime-t-il, ils s'intégreront et il n'y
aura pas de séparation dans les cimetières entre musulmans
et non-musulmans. Il faut être croyant pour croire aux miracles
sans un coup de pouce de la part de l'État.
Zurich
Dans la ville de Zurich deux solutions se présentaient.
Les musulmans pouvaient acheter un terrain pour un cimetière
privé, mais ce projet a échoué en 1997 en raison
de son prix. L'autre solution était d'obtenir un carré
séparé de 8000m2 dans le cimetière public existant
de Eichbuehl-Altstätten. Cette dernière solution se
heurtait cependant à l'article 35 de l'Ordonnance cantonale
de 1963 qui interdit de créer des carrés séparés
dans les cimetières publics. Il fallait donc préalablement
changer cette ordonnance. La majorité des communes ont rejeté
l'idée d'une séparation à l'intérieur
des cimetières sur la base de la religion, certaines laissant
la porte ouverte pour une clause d'exception dans des cas particuliers
ou pour la délégation de compétence à
une commune qui serait libre de décider en la matière.
Ce changement est intervenu le 27 juin 2001, notamment grâce
au soutien des Églises catholique et réformée,
ouvrant ainsi la voie pour l'octroi d'un carré réservé
exclusivement aux musulmans. On signalera ici que le pasteur Leonhard
Suter a rédigé en octobre 1997 un rapport à
l'intention de son église réformée, basé
notamment sur un article du juge fédéral Niccolò
Raselli . Quant aux autorités catholiques, elles ont sollicité
un avis juridique du professeur Walter Kälin . Tous les trois
se sont prononcés en faveur d'un cimetière confessionnel.
Se basant sur une documentation musulmane minimale, ils n'ont fait
que reprendre les arguments des milieux intégristes musulmans
suisses sans se poser des questions sur leurs réelles motivations.
J'ai demandé le 27 mai 2001 à un responsable d'un
Centre islamique à Zurich pour quelle raison il revendiquait
un cimetière ou un carré réservé exclusivement
aux musulmans. Sa réponse fut: "Je ne veux pas être
enterré près de la tombe d'un mécréant
portant une croix". Ismail Amin, président de l'Union
des organisations islamiques de Zurich, affirme qu'un des objectifs
de son organisation est "l'établissement d'un cimetière
où les musulmans pourraient être enterrés selon
la tradition musulmane". Il précise qu'il n'acceptera
jamais qu'un membre du groupe dissident Ahmadite soit enterré
dans ce cimetière musulman .
2) Direction de la tombe
A)
Normes musulmanes
Au
début, Mahomet se tournait dans sa prière vers Jérusalem
comme le font les juifs. Mais seize mois après son arrivée
à Médine, il décida de remplacer la direction
de Jérusalem par celle de la Kaaba, à la Mecque, pour
se démarquer des juifs . Les musulmans croient que la Kaaba
fut construite par Abraham comme sanctuaire pour le culte de Dieu.
Elle constitue l'objet le plus sacré chez les musulmans après
le Coran, et fait l'objet de différentes normes: le musulman
doit tourner sept fois autour d'elle dans son pèlerinage,
se diriger vers elle dans sa prière, et éviter d'avoir
le séant ou le visage orientés dans sa direction lorsqu'il
fait ses besoins . Cette conception anthropomorphique de la divinité,
héritée des juifs et des polythéistes arabes,
se heurte à une autre conception coranique selon laquelle
Dieu est omniprésent (2:115) et que la religiosité
ne dépend pas de la direction mais de la foi et des bonnes
uvres (2:177).
Les légistes musulmans classiques estiment que le mort doit
être enterré sur son flanc face à la Kaaba,
c'est-à-dire que l'axe de sa tombe doit être perpendiculaire
à la Kaaba. Cette dernière règle se base sur
une parole de Mahomet qui aurait dit que la Kaaba est la direction
des musulmans tant vivants que morts . Mais les légistes
classiques sont divisés sur le point de savoir s'il faut
mettre le mourant vers la Kaaba et faire de même pendant qu'on
le lave après sa mort, ou s'il faut se limiter à le
diriger dans sa tombe vers elle. Invoquant le verset 2:115, Ibn-Hazm
n'exige l'orientation vers la Kaaba que dans la tombe . On signalera
ici que les juifs enterrent les morts avec les pieds tournés
vers Jérusalem pour qu'ils puissent s'y rendre directement
le jour de la résurrection . Certains rabbins ont suggéré
que si l'on n'arrive pas à aligner les tombes vers Jérusalem,
on devait entourer le cimetière d'une enceinte avec une porte
vers Jérusalem, les pieds étant alors dirigés
vers la porte .
B)
Normes suisses
Dans
l'aide-mémoire de la Fondation des cimetières islamiques
suisses, il est noté que les tombes doivent être
orientées selon l'axe 40º-220º, et que le corps
doit être étendu sur le côté droit de
telle sorte que le visage soit orienté à 130º
(direction de la Mecque). Une feuille de la Fondation culturelle
islamique indique: "Il faut diriger le mort vers la Kibla
(Kaaba) (obligatoire!). Le Prophète a dit: C'est votre Kibla,
morts ou vivants".
Dans l'interview avec une commission genevoise en mars 1999, Hafid
Ouardiri, porte-parole de la Fondation culturelle islamique,
précise: "Pour les musulmans,
l'élément principal est que l'ensevelissement se fasse
dans une tombe dirigée vers la Mecque, car c'est de là
que la résurrection se fera" . Cette référence
à la résurrection en rapport avec la direction de
la tombe ne se trouve, à notre connaissance, chez aucun légiste
musulman classique. Probablement Hafid Ouardiri l'emprunte-t-il
aux juifs.
Lorsque les fosses sont creusées les unes à la suite
des autres, selon un ordre préétabli, la norme islamique
pose problème quant à l'ordre à respecter dans
les cimetières. Les cantons et les communes ont le droit,
voire le devoir, de prescrire un tel ordre. Il en va de la décence
de la sépulture. D'autre part, comme les morts sont enterrés
sans distinction de religion, modifier l'orientation de la tombe
d'un musulman dans une ligne, outre la disharmonie engendrée
dans le cimetière, constitue une distinction entre les morts
sur la base de la religion. Rappelons à cet égard
que le droit musulman prescrit que les musulmans se mettent en rangées
harmonieuses dans leurs prières.
Signalons que la détermination de la direction de la Kaaba
n'est pas toujours aisée. Les architectes musulmans de la
Mosquée de Genève se sont trompés dans l'emplacement
de la niche supposée indiquer la direction de la Kaaba, et
l'on ne s'en est rendu compte que plusieurs années plus tard.
D'autre part, la direction de la Kaaba pouvait correspondre à
la conception selon laquelle la Terre est plate, mais ne fonctionne
pas avec une Terre ronde. Un mort dirigé vers la Kaaba en
Suisse fixe son regard vers une étoile. Pour avoir le visage
tourné vers la Kaaba, il faudrait pratiquement mettre le
mort visage contre terre. Et si on accepte l'idée qu'il suffit
de se trouver dans l'axe de la Kaaba, alors quelle que soit la position
dans laquelle on mettra le mort il aura son visage et son dos dirigés
vers la Kaaba. Si le but est de fixer la Kaaba, on pourrait installer
un miroir rétroviseur, voire une télévision
ou une installation Internet, pour être moderne.
Même si une commune déroge à l'ordre dans le
cimetière pour avoir des tombes dirigées vers la Kaaba,
comme souhaité par les musulmans, ceux-ci n'acceptent pas
pour autant de se faire enterrer près d'un "mécréant".
Ainsi, la commune de Zollikon avait changé son Règlement
pour permettre d'enterrer les musulmans dans la direction de la
Kaaba, mais sans octroyer aux musulmans une parcelle à part.
Les musulmans n'ont pas profité de cette opportunité,
préférant rapatrier leurs morts à grands frais
pour ne pas les ensevelir près d'un mécréant.
3) Linceul, cercueil et tombe
A)
Normes musulmanes
Le
Coran ne dit rien sur les modalités de l'enterrement. Les
légistes classiques ont cependant déduit des dires
de Mahomet, de la manière dont il enterra les siens et fut
lui-même enterré que le musulman doit se faire enterrer
dans un linceul, blanc de préférence. L'idéal
selon certains est que l'homme soit enroulé dans trois pièces,
et la femme dans cinq pièces. Mais les opinions des légistes
classiques diffèrent sur ce point . Le pèlerin sacralisé
est enveloppé seulement de son habit de pèlerin, la
tête découverte. Quant au martyr, il est enterré
avec ses habits dans lesquels il a été tué,
sans le laver, contrairement aux autres morts. Mahomet aurait dit
que le martyr est lavé par les anges , et selon un autre
récit: "Ne lavez pas les martyrs, parce que chaque blessure
a la couleur du sang et son odeur est celui du musc le jour de la
résurrection" .
Les légistes classiques répugnent généralement
à l'utilisation du cercueil. Ils estiment que le cercueil
est une perte d'argent sans raison légale et une manière
de glorifier le mort. Toutefois, ils permettent l'utilisation du
cercueil si la terre s'effrite ou si elle est humide parce qu'il
est préférable que le mort reste le plus longtemps
possible non décomposé dans sa tombe . Ils recommandent,
voire imposent l'utilisation du cercueil lorsque l'on enterre une
femme, pour éviter que des mains étrangères
touchent directement son corps. L'utilisation du cercueil s'impose
aussi si le corps est brûlé, déchiqueté
ou ne peut pas être contenu ni porté dans le simple
linceul, ou si l'on craint que les animaux ne le déterrent
. En cas d'utilisation d'un cercueil, Ibn-Abidin préconise
de recouvrir son fond avec de la terre, ainsi il devient comme une
niche . En ce qui concerne la tombe, deux formes sont préconisées:
-
La fosse avec une niche (lahd). Après avoir creusé
une fosse, on pratique une niche du côté de la Kaaba
dans laquelle l'homme est placé, visage tourné vers
la Kaaba. On ferme ensuite cette niche avec des lattes de pierre
et on déverse la terre dans la tombe.
- La fosse simple (shaq) dans laquelle on dépose
le mort entouré de deux rangées de pierres et couvert
par des lattes de pierres qui ne le touchent pas afin que la terre
déversée n'abîme pas le corps.
Mahomet
aurait dit que la fosse avec une niche échoit aux musulmans,
et la fosse simple aux autres . Mais les légistes classiques
ont constaté que la niche ne peut pas être pratiquée
partout, notamment lorsque la terre est sablonneuse et s'effrite.
De ce fait, ils ont permis le recours à la fosse en préconisant
l'utilisation des pierres autour et au-dessus du mort, créant
ainsi une niche artificielle qui le protège. Et si les pierres
font défaut, ils permettent d'utiliser des lattes en bois,
des roseaux, voire de l'herbe. On permet aussi aujourd'hui des lattes
en béton. La préférence reste cependant la
pierre, si elle est facile à trouver .
Signalons aussi que les légistes classiques sont favorables
aux tombes simples, sans construction par-dessus, avec un petit
tas de terre surélevé pour signaler sa présence
et empêcher que les gens la piétinent. Mais cette simplicité
n'est suivie que dans certains pays musulmans, notamment en Arabie
saoudite.
B) Normes suisses
L'aide-mémoire
de la Fondation des cimetières islamiques suisses
indique les éléments suivants pour une tombe musulmane:
- La profondeur (de la tombe)
doit correspondre à
1.5 m, au minimum (soit au moins les ¾ de la hauteur d'un
homme).
- Il est souhaitable que le corps du défunt puisse reposer
dans une niche, creusée parallèlement au fond de
la tombe.
- Pierres tombales coûteuses et sophistiquées, monuments
funéraires, mausolées, statues, et autres pratiques
du même type ne sont pas autorisés.
- La pierre tombale doit être la plus simple possible; sur
demande de la famille du défunt, il doit être possible
d'y renoncer.
- Le corps devrait être enveloppé dans un linceul.
- Au cas où un cercueil est légalement prescrit,
celui-ci doit être le plus simple et léger possible.
On trouve des indications similaires dans une feuille de la Fondation
culturelle islamique.
Si nous prenons les lois cantonales, nous nous rendons compte que
ces revendications ne présentent aucun problème particulier
et ne justifient pas un cimetière musulman séparé.
En effet, aucune loi cantonale n'interdit l'utilisation du linceul.
Toutes ces lois imposent l'utilisation du cercueil pour des raisons
de salubrité, afin de ne pas contaminer les nappes phréatiques.
Les musulmans à Berne et à Bâle ont d'ailleurs
accepté de se faire enterrer dans un cercueil. Les lois cantonales
n'empêchent pas que le cercueil soit simple et que l'apparence
extérieure de la tombe soit modeste. On constate à
cet égard que la modestie de la tombe n'est pas toujours
respectée par les musulmans dans leur cimetière à
Genève.
En Suisse, les morts sont enterrés dans une fosse; on ne
pratique pas la niche comme le recommande le droit musulman, mais
ce droit admet que l'on puisse y renoncer en cas d'effritement et
d'humidité du sol, ce qui est le cas en Suisse.
4) Temps de l'enterrement
A)
Normes musulmanes
Le
Coran ne dit rien concernant le temps de l'enterrement, mais plusieurs
récits de Mahomet sont rapportés à ce sujet
dont:
- Trois choses ne doivent pas être retardées: la
prière lorsqu'elle vient; les funérailles lorsqu'elles
se présentent et la femme non-mariée lorsqu'elle
trouve un mari qui lui est digne .
- Hâtez-vous d'enterrer les morts. S'ils étaient
bons, c'est vers le bien que vous les emmenez, et s'ils étaient
mauvais, c'est d'un mal que vous vous débarrassez .
On a déduit de ces récits que les funérailles
doivent intervenir le plus rapidement possible après la mort
et que ceux qui amènent le mort vers la tombe doivent se
hâter dans leur marche.
Il est permis d'enterrer le mort de jour comme de nuit . Toutefois,
Mahomet a interdit d'enterrer le mort à trois moments de
la journée: dans le quart d'heure qui suit le lever du soleil,
celui qui suit sa position zénithale et dans les sept minutes
qui précèdent le coucher du soleil . On ne connaît
pas la raison de cette interdiction.
Tout en insistant sur le devoir d'enterrer rapidement le défunt,
les légistes classiques exigent que la mort soit effective
et vérifiée. Ainsi, on retardera l'enterrement du
noyé de peur qu'il ne soit simplement suffoqué. Averroès
(d. 1198) en déduit qu'il faut aussi retarder l'enterrement
lorsque le mort est dans le coma ou victime d'autres maladies. En
tant que médecin, il dit que dans ces cas il ne faudrait
pas enterrer le mort avant trois jours . Ibn-Hazm écrit qu'il
est préférable de retarder l'enterrement ne fût-ce
que d'un jour et d'une nuit, notamment pour ceux qui sont dans le
coma, à moins que le corps ne se détériore.
Il fait état d'une opinion selon laquelle les foudroyés
ne doivent pas être enterrés avant trois jours, et
que Mahomet, mort un lundi à midi, fut enterré au
milieu de la nuit du mercredi .
B) Normes suisses
L'aide-mémoire
de la Fondation des cimetières islamiques suisses
indique: "L'enterrement devrait avoir
lieu le jour du décès, ou le lendemain au plus tard".
Une feuille de la Fondation culturelle islamique précise:
"Il est recommandé d'activer
les préparatifs de l'enterrement, sauf raisons valables (par
exemple autopsie)".
Outre le fait que l'exigence des musulmans en Suisse
ne tient pas compte de la souplesse des légistes musulmans
classiques cités plus haut, cette exigence se heurte à
des normes cantonales. Ainsi, en réponse à la Fondation
culturelle islamique, la ville de Fribourg écrit dans
sa lettre du 6 octobre 1993: "Le fait
que l'inhumation d'un corps doit se faire le jour même du
décès, à la rigueur le lendemain, nécessite
une disponibilité excessive (y compris le week-end) du personnel
affecté au service des inhumations". Il y
a donc la question de la disponibilité du personnel, mais
aussi le respect de la procédure et d'un délai minimal
avant d'enterrer le mort. Ce délai a pour but d'assurer les
proches en particulier et toute la population en général
que la personne qui sera inhumée est effectivement morte.
Ce délai est aussi dicté par le souci de prévenir
des exhumations inutiles. En effet on peut raisonnablement supposer
qu'en cas de contestations quant à la cause ou aux circonstances
du décès, un délai de 48 heures est suffisant
pour que les arguments soient présentés aux autorités
judiciaires et qu'une enquête puisse déterminer ce
qui s'est réellement passé . L'esprit de ces normes
cantonales est en parfaite concordance avec l'esprit des normes
musulmanes. Par conséquent, rien ne justifie un traitement
spécial pour les musulmans, contrairement à ce que
pourraient faire croire les deux documents cités plus haut.
5) Permanence des tombes
Les
morts ne doivent pas encombrer les vivants. Pour résoudre
le problème de l'espace, on procède à la désinfection
périodique des cimetières et à l'exhumation
des restes humains pour les incinérer ou les déposer
dans des ossuaires. Un troisième système consiste
à réduire les corps en cendres immédiatement
après la mort, cendres que l'on conserve dans de petites
urnes ou que l'on disperse dans la nature. Ainsi on est passé
des pyramides éternelles des pharaons aux tombes provisoires,
et des tombes provisoires aux cendres que les eaux ou les vents
transportent. Mais ce passage ne s'est pas effectué sans
résistance.
A) Normes musulmanes
Le
Coran ne dit rien concernant la permanence et la désaffectation
des tombes. On rapporte cependant que Mahomet avait désaffecté
des tombes de polythéistes pour y construire sa propre mosquée
à Médine. Certains récits de Mahomet incitent
au respect des tombes. Ainsi il aurait interdit de marcher avec
des souliers de cuir parmi les tombes . Il aurait aussi dit: "Casser
les os d'un mort est comme casser les os d'un vivant"
; "Celui qui s'assoit sur une tombe,
c'est comme celui qui s'assoit sur un brasier" .
Ces interdictions partent du respect que les humains doivent aux
morts, mais aussi de la croyance selon laquelle les morts entendent
les vivants parler, et sentent les pas de ceux qui marchent près
de leur tombe.
À partir de ces récits, les légistes classiques
se sont demandé s'il était possible d'exhumer le mort,
de réutiliser la tombe pour y enterrer une autre personne,
et de construire ou planter sur un terrain contenant une tombe après
ou sans exhumation des ossements. Ibn-Abidin écrit qu'il
est préférable d'enterrer chacun dans une tombe, sauf
en cas de nécessité. On n'ouvre une tombe pour la
réutiliser que si le premier enterré est redevenu
terre, n'y laissant pas d'ossements. Mais si l'on trouve des ossements,
on les met de côté et on les sépare du nouveau
mort par de la terre. Il rejette la position rigoriste qui interdit
la réutilisation de la tombe, parce qu'il n'est pas possible
de préparer une tombe exclusive pour chaque personne dans
les régions peuplées sans que les tombes envahissent
les plaines fertiles et les régions en friche. Il indique
que certains légistes classiques ont permis de construire
sur les tombes et d'utiliser la terre des cimetières pour
l'agriculture si les corps ont péri .
Avec l'expansion de l'urbanisation, les pays musulmans se sont demandé
s'il était possible de désaffecter les tombes. Plusieurs
fatwas ont été émises à ce sujet.
Certaines de ces fatwas étaient au début opposées
à la désaffectation des cimetières, tout en
permettant d'enterrer les morts les uns sur les autres. Mais elles
ont fini par accepter aussi bien la réutilisation des tombes
que la désaffectation totale des cimetières pour en
faire un terrain agricole, pour y construire des bâtiments
ou pour y faire passer des routes .
B)
Normes suisses
Une
feuille de la Fondation culturelle islamique indique: "Il
est strictement interdit de déterrer un mort sans une raison
impérieuse, comme par exemple si la toilette du défunt
n'a pas été faite ou s'il n'a pas de linceul".
L'aide-mémoire de la Fondation des cimetières islamiques
suisses dit: "L'exhumation est exclue; de telle sorte qu'il
est nécessaire d'acquérir une concession perpétuelle".
Invoquant les articles constitutionnels relatifs à la liberté
de conscience et de culte et au droit à un enterrement décent
ainsi que des articles des documents internationaux, le Président
de la Fondation des cimetières islamiques suisses,
Abd-Allah Lucien Meyers, un converti, demanda en 1995 à sa
commune la garantie d'une durée perpétuelle de la
sépulture et le regroupement de toutes les tombes islamiques
en un même endroit du cimetière public. La commune
accepta de lui accorder une concession de 50 ans avec possibilité
de renouvellement pour 20 ans mais refusa de regrouper les tombes
islamiques. Il recourut au Conseil d'État zurichois, mais
sans succès. Il s'adressa alors au Tribunal fédéral
qui, lui aussi, rejeta sa demande le 5 juin 1999, estimant qu' "une
telle obligation mettrait en question l'aménagement même
et l'exploitation des cimetières publics et constituerait
un usage privatif durable du domaine public. Or, même la liberté
religieuse et des cultes n'impose pas à la collectivité
une telle exigence qui limiterait de manière inacceptable
sa marge de manuvre face aux développements ultérieurs.
De plus, en vertu du principe d'égalité, des sépultures
perpétuelles devraient être offertes à tous
les citoyens, ce qui entraînerait d'importants problèmes"
.
Conscient sans doute du problème, Hafid Ouardiri, porte-parole
de la Fondation culturelle islamique, a accepté de
mettre de l'eau dans son vin en permettant d'enterrer un défunt
par-dessus un autre après la décomposition du corps.
Il a affirmé devant une commission genevoise en mars 1999:
"Pour les musulmans, il n'est pas nécessaire que la
tombe soit éternelle. On peut enterrer un défunt par-dessus
un autre après la décomposition du corps
. Ils
sont ouverts à discuter à combien devrait se monter
le laps de temps avant d'enterrer un nouveau défunt dans
la même tombe, car ils sont bien conscients de la question
de l'espace" .
Les musulmans ont fini par céder sur la condition de la concession
perpétuelle à Berne et à Bâle-Ville.
Les tombes musulmanes, comme toutes les tombes à la ligne,
peuvent être réutilisées après vingt
ans, sans évacuation des ossements. Mais cette réutilisation
est limitée à des musulmans puisque les tombes se
trouvent dans un carré réservé exclusivement
aux musulmans. En aucun cas les musulmans n'acceptent qu'un musulman
soit mis sur un "mécréant", ni un "mécréant"
sur un musulman.
6) Incinération
Réprouvée
à travers les siècles par les trois communautés
juive, chrétienne et musulmane, l'incinération revient
aujourd'hui en force en Occident parmi les chrétiens pour
des raisons philosophiques, économiques, écologiques,
hygiéniques, juridiques (respect des vux du défunt),
pratiques, etc. Condamnée par le pape Léon XIII en
1886 et le Code de droit canon de 1917, elle fut admise par l'Église
catholique en 1963 . Mais l'évolution de la crémation
diffère d'un pays à l'autre. Ainsi le taux d'incinération
en 1998 est de 4.09% en Italie, 14.90% en France, 67.9% en Suisse,
71.42% en Angleterre et 98.42% au Japon . Des juifs libéraux
et des musulmans y recourent, mais on n'en connaît pas le
pourcentage, probablement infime.
A) Normes musulmanes
Le
Coran mentionne l'enterrement des morts. Il raconte qu'après
l'assassinat d'Abel par Caïn, Dieu envoya à ce dernier
un corbeau qui gratta la terre pour lui indiquer comment faire disparaître
la dépouille de son frère (5:31). Ailleurs il est
dit: "De la terre, nous vous créâmes. En elle,
nous vous ramènerons. D'elle, nous vous ferons surgir une
autre fois" (20:55).
On trouve des récits selon lesquels Mahomet aurait interdit
de mettre à mort par le feu. Ainsi, après qu'Ali eut
brûlé vifs des apostats, Ibn-Abbas objecta en disant
qu'il ne les aurait pas brûlés mais exécutés
selon la parole de Mahomet: "Celui qui change sa religion,
tuez-le". Il invoque contre l'usage du feu une parole de Mahomet
qui dit: "Ne punissez pas avec la sanction de Dieu" .
Dans un autre récit, Mahomet aurait ordonné à
Hamzah Al-Aslami: "Si vous prenez un tel, brûlez-le",
ensuite il le rappela et lui dit: "Si vous prenez un tel, tuez-le
et ne le brûlez pas parce que personne ne peut châtier
par le feu autre que le maître du feu" . Mahomet aurait
aussi interdit de détruire une fourmilière par le
feu . L'interdiction de faire usage de l'incinération dans
ces récits se rapporte donc à l'incinération
en tant que sanction du vivant de la personne.
D'après un autre récit de Mahomet, un homme réunit
ses enfants autour de lui au moment de sa mort et leur demanda ce
qu'ils pensaient de lui. Ses enfants lui répondirent qu'il
était le meilleur des pères. Il leur dit, par humilité,
qu'il n'avait fait auprès de Dieu aucun bien et que si Dieu
pouvait le saisir, il le punirait comme personne n'a été
puni. Il fit alors jurer ses enfants de le brûler après
sa mort jusqu'à ce qu'il devienne du charbon, de le réduire
en cendres et de les disperser un jour de vent, moitié dans
la terre et moitié dans la mer, pensant ainsi échapper
à Dieu. Après la mort, les fils exécutèrent
la volonté de leur père. Dieu donna l'ordre à
la terre et à la mer de rendre les parts du décédé
et voilà l'homme debout en présence de Dieu. Dieu
lui demanda: "Qu'est-ce qui te poussa à donner un tel
ordre?", et le défunt répondit: "Ma crainte
de toi, Seigneur". Dieu le combla alors de sa miséricorde
. Ce récit vise à démontrer que Dieu est capable
de ressusciter l'homme même s'il est incinéré
et ses cendres dispersées par le vent. Il ne comporte aucune
désapprobation de l'incinération.
Dans certains pays arabes, il existe des crématoires pour
ceux dont les normes religieuses permettent l'incinération.
C'est le cas en Égypte . Les ouvrages en arabe ne traitent
pas de l'incinération puisqu'elle n'est pas d'usage chez
les musulmans, mais la Commission de fatwa égyptienne se
prononça concernant cette pratique le 29 juillet 1953:
Tous
les musulmans s'accordent sur le fait que l'être humain
a une immunité et une dignité tant vivant que mort,
comme l'indique la parole de Dieu: "Nous avons honoré
les fils d'Adam" (17:70). Selon les récits authentiques
du Prophète, suivis par ses compagnons, leurs successeurs
et tous les musulmans jusqu'à aujourd'hui, l'enterrement
dans une niche ou une fosse fait partie de la dignité d'un
être humain après sa mort. De ce fait, il n'est pas
permis d'incinérer les cadavres des musulmans. Et si le
défunt avait demandé cela par testament, son testament
serait nul et non exécutable. L'incinération des
cadavres n'a été connue que dans les traditions
des zoroastriens, et on nous a commandé de faire différemment
de ce qu'ils font et de ce qui ne correspond pas à notre
loi noble .
On
trouve d'autres fatwas sur Internet, sollicitées par
des musulmans vivant en Occident . En réponse à ma
demande du 10 mai 2001, le service de fatwa d'islam-online
écrit:
L'islam
interdit strictement de châtier un vivant par le feu. Pour
cela, lorsque le Prophète a vu que ses compagnons avaient
brûlé une fourmilière, il leur dit: "Ne
peut châtier par le feu que le maître du feu".
De même il est interdit de brûler les morts en raison
du récit de Mahomet: "Ce qui fait souffrir le vivant
fait souffrir le mort". L'islam insiste sur le fait que
l'eau servant à laver le défunt doit être
chauffée à un degré moyen supportable et
ne le faisant pas souffrir. On doit imaginer que le mort est vivant,
ce dont on doit tenir compte pour ce qui pourrait lui faire du
mal et ce qui lui serait utile. Ainsi l'eau ne sera pas chauffée
à ébullition pour que sa peau ne soit pas pelée.
À plus forte raison, il est interdit de brûler le
mort.
Il n'existe pas de pratique d'incinération des morts musulmans
dans les pays arabes parce que ce rituel se rattache à
des religions et des groupes religieux non célestes. Une
telle pratique ne se trouve ni chez les musulmans, ni chez les
juifs, ni chez les chrétiens. Et je ne connais aucun musulman
dans un pays occidental qui ait demandé à se faire
incinérer, à moins d'avoir suivi avant sa mort d'autres
enseignements que ceux de l'islam ou d'avoir changé sa
religion. Et dans ce cas nous ne pouvons pas le compter parmi
les musulmans ni en tenir compte dans notre fatwa .
On
remarque dans cette fatwa la référence au récit
de Mahomet: "Ce qui fait souffrir le vivant fait souffrir le
mort". Or si on veut suivre ce récit, on ne devrait
ni mettre le mort sous terre, ni le jeter dans la mer au cas où
il mourrait sur un bateau puisque ces deux mesures, si appliquées
à un vivant, le font souffrir. Certes, l'incinération
n'est pas d'usage chez les musulmans. Mais le Coran permet un changement
dans ce domaine puisqu'il interdit de gaspiller inutilement de l'argent
(17:26) et d'endommager la nature (2:60). D'ailleurs, certains musulmans
recourent déjà à l'incinération en Occident,
notamment parmi ceux qui sont mariés à des non-musulmanes
. Si aujourd'hui les autorités religieuses juives, chrétiennes
ou musulmanes restent hostiles à l'incinération, c'est
probablement parce que l'ensevelissement leur rapporte plus sur
le plan financier et sur le plan du pouvoir.
B)
Normes suisses
L'aide-mémoire
de la Fondation des cimetières islamiques suisses
indique: "L'incinération est absolument interdite".
Une feuille de la Fondation culturelle islamique précise:
Toutes
les écoles coraniques sont unanimes quant au fait que la
terre est le lieu final de chaque dépouille. Le Coran dit:
"N'avons-nous pas fait de la terre un endroit les contenant
tous, les vivants ainsi que les morts" (77:25). Il dit aussi:
"C'est d'une goutte de sperme qu'il l'a créé.
Puis il lui donna ses proportions exactes. Ensuite, il lui rendit
la voie facile. Puis il l'a fait mourir et inhumer" (80:19-21).
Nous en déduisons donc que l'incinération est totalement
interdite.
La Suisse a connu le même débat sur l'incinération
que le reste de l'Europe. Lors de la rédaction de la Constitution
de 1874, la question de l'incinération n'a pas été
évoquée. De ce fait, l'article 53 al. 2 aCst ne parle
que du droit d'être "enterré décemment".
En 1884, un avocat de la Chaux-de-Fonds a remis une pétition
au Conseil fédéral demandant que l'incinération
soit considérée comme "mode de sépulture
décent, par conséquent autorisée dans le sens
de la Constitution fédérale, dans tous les cantons
et municipalités qui voudront l'introduire". Le Conseil
fédéral décida qu'il n'était pas nécessaire
de légiférer en la matière, et d'en laisser
la compétence aux cantons. Il ajouta:
Il n'a pas paru nécessaire aux partisans de la crémation
à Zurich et aux autorités zurichoises de consulter
l'autorité fédérale législative ou
exécutive sur la question de savoir si ce mode de sépulture
est décent; on ne peut que les approuver. C'est à
bon droit qu'ils ont pensé aussi que l'incinération
ou la crémation des dépouilles humaines, préconisée
par les hommes de la science, déclarée compatible
avec la religion chrétienne par les ecclésiastiques
et chantée même par les poètes de l'antiquité
et des temps modernes, ne pourrait jamais être conspuée
par vous ou nous comme quelque chose d'indécent! Une pareille
objection n'a en effet été présentée,
que nous sachions, par aucune autorité ayant eu à
s'occuper de la chose .
Il
existe aujourd'hui en Suisse 59 crématoires, selon le rapport
annuel de l'Union suisse de crémation 1997/1998.
67.97% des décédés en Suisse en 1998 ont été
incinérés, ce qui met la Suisse en tête des
pays occidentaux après l'Angleterre. La crémation
est autorisée par toutes les lois cantonales même si
certains cantons ne disposent toujours pas d'installations de crémation
pour des considérations religieuses. C'est le cas notamment
du canton catholique de Fribourg qui, pourtant, autorise l'incinération
(Arrêté du 5 décembre 2000, article 4 al. 4
). Celui qui veut se faire incinérer à Fribourg doit
passer par un autre canton.
Aucun canton n'impose la crémation. L'article 1er du Décret
jurassien du 6 décembre 1978 relatif à la crémation
stipule: "Ce genre de sépulture ne peut pas être
rendu obligatoire". Mais cela n'exclut pas l'imposition de
la crémation en cas d'épidémie . D'autre part,
certains cantons procèdent parfois à l'incinération
des ossements après la désaffectation des tombes selon
les délais légaux .
L'incinération est pratiquée soit à la demande
du défunt, soit à la demande de ses proches, la volonté
du défunt primant sur celle des proches. Dans le canton du
Jura, l'article 1er du Décret du 6 décembre 1978 relatif
à la crémation autorise celle-ci:
lorsque le défunt a manifesté, par écrit,
son désir d'être incinéré, ou bien
lorsque ses proches demandent sa crémation, pourvu qu'il
ne s'élève pas à cet égard d'opposition
parmi eux, ou encore lorsque les personnes chargées du
soin de la sépulture du défunt réclament
l'incinération, à moins toutefois qu'il n'existe
de dernière volonté contraire.
Ce
décret ne définit pas le terme proche. Si les proches
sont de même degré, cela ne pose pas de problème.
Mais qu'en est-il s'il y a plusieurs proches à des degrés
différents? On peut présumer dans ce cas que l'avis
du plus proche parent prime sur celui du plus lointain parent. Le
Tribunal fédéral a confirmé que les personnes
en droit de disposer du cadavre étaient celles qui avaient
des rapports étroits avec le défunt et qui étaient
les plus sensibilisées par sa disparition .
La communauté religieuse du défunt n'a pas le droit
d'intervenir pour interdire une incinération. Mais peut-elle
refuser le dépôt de l'urne dans le cimetière
confessionnel? Cette question a reçu une réponse négative
de la part des autorités bâloises dans un cas concernant
la communauté israélite. Cette décision fut
critiquée par Wyler, qui estime que les autorités
civiles ne peuvent accorder à une communauté religieuse
un cimetière privé et en même temps contraindre
cette communauté à agir contre ses convictions . Mais
cette critique n'est pas fondée, du fait que la crémation
ne peut pas être considérée comme indécente
par la communauté juive. Si cette communauté refuse
à un incinéré le droit de se faire enterrer
dans le cimetière juif, cela signifie un retour à
la pratique de l'Église catholique qui mettait les suicidés
hors du cimetière, pratique condamnée par le Conseil
fédéral. Bien plus grave est la concession faite par
la ville de Berne qui, en octroyant à la communauté
musulmane un carré séparé dans le cimetière
public, lui a fait la promesse qu'on ne placera pas à l'avenir
dans ce carré de cendres ou d'urnes contenant des cendres
. Cela signifie que l'incinération est considérée
comme une sépulture indécente et que la commune donne
aux responsables de la communauté musulmane la possibilité
de contraindre les musulmans à renoncer à l'incinération
sous peine d'être interdits d'enterrement dans le carré
musulman. Il s'agit là d'une atteinte à la liberté
religieuse contraire à la Constitution.
Le problème de l'incinération des musulmans s'est
posé à Lausanne en mars 2001 . Ben Younes Dhif, un
Marocain musulman marié à une Vaudoise chrétienne
a exprimé le souhait d'être incinéré,
et sa femme voulait respecter ses vux. Deux neveux de Ben
Younes, venus de France, s'y sont opposés et ont alerté
la presse, l'Ambassade du Maroc, les mosquées et les centres
islamiques. Une pétition a même été lancée.
Hani Ramadan, directeur du Centre islamique de Genève, s'est
jeté dans la bataille, déclarant:
C'est
la première fois qu'un tel cas de figure se présente.
En Suisse, il y a de plus en plus de couples mixtes musulmans-chrétiens,
mais jusqu'à présent, à ma connaissance,
les convictions religieuses des défunts ont toujours été
respectées. L'incinération est tout simplement illicite
dans l'islam. Le Prophète Mahomet l'a écrit: casser
les os d'un cadavre musulman revient à le briser comme
s'il était vivant; la dépouille doit être
respectée. Il est même exigé de procéder
à l'ensevelissement très rapidement pour préserver
son intimité et éviter toute déchéance.
Quant
à Hafid Ouardiri, porte-parole de la Fondation culturelle
islamique de Genève, il déclara: "Cette situation
est étonnante. Je ne comprends pas que la veuve de ce Marocain
et sa famille s'opposent à un rituel musulman. Peut-être
faut-il mieux expliquer à la veuve pourquoi l'incinération
est interdite dans le Coran". Et de conclure: "Quoi qu'il
en soit, je suis formel: il est impératif de respecter la
foi du mari!" Pour empêcher l'incinération, les
neveux de Ben Younes ont mandaté un avocat, Me Jean-Pierre
Moser, qui est immédiatement intervenu auprès du Tribunal
de district de Lausanne. Face aux pressions exercées sur
elle, la veuve a fini par céder au tribunal, renonçant
à ce que la justice se décide sur ce cas. Elle n'a
pas voulu se battre autour de la dépouille de son mari:
J'essaie
de comprendre leurs motivations. Mais ce qu'ils ont fait est odieux.
Ils ne respectent tout simplement pas les dernières volontés
de mon époux. Quand nous les avons appelés pour
leur dire que son état de santé était gravissime,
trois mois avant son décès, ils ont promis de venir.
Ce n'est qu'après sa mort qu'ils se sont manifestés
.
Les
centres islamiques auraient pu profiter de ce cas pour éduquer
leurs coreligionnaires au lieu de les maintenir dans l'ignorance
et de les pousser à enfreindre la dernière volonté
du défunt. Ce cas a laissé un goût d'amertume
parmi plusieurs chrétiens qui ont été ainsi
confirmés dans leur idée que les musulmans sont incapables
ou refusent de s'intégrer. Mais nous pensons que les musulmans
vivant en Suisse ne pourront pas échapper à ce débat
et finiront par adopter l'incinération comme la majorité
de la population suisse.
Pour conclure la question des cimetières, on peut dire que
seul le premier argument (refus d'être enterré près
d'un mécréant) pourrait justifier l'octroi d'un cimetière
ou d'un carré séparé réservé
exclusivement aux musulmans. Mais cet argument pose problème
car il est discriminatoire. Et l'État n'a pas à se
porter garant de la discrimination. Si je refuse de m'asseoir à
côté d'un juif ou d'un musulman, je serai traité
de raciste. Pourquoi ce qui est interdit pendant la vie serait-il
permis après la mort? Pour cette raison, nous sommes pour
la suppression en Suisse de tous les cimetières religieux
existants, y compris les cimetières juifs. Toute solution
ou demande contraire devrait tomber sous le coup de la loi contre
le racisme.
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Sami
Aldeeb, doctor of laws
Chairman
/ Président
aldeeb@bluewin.ch
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